Quand toute une vie prend sens: les pièces du puzzle qui manquaient [fr]

[en] 2021 will forever be the year where I finally got the explanation and solutions to so many of the problems which plague my everyday life: chronic procrastination, tons of ideas of things to start but huge difficulties with follow-through and finishing, difficulties with delayed gratification, inability to "just do it" but at the same-time machine-like productivity when in the right context, etc.

Il y a des moments dans la vie où tout change, où tout va changer, où on voit que tout est en train de changer. Depuis quelques mois, je vis un moment comme ça. L’année 2021 va rester un tournant capital dans l’histoire de ma vie. 

La procrastination

Depuis toujours, je me heurte à des problèmes de procrastination. J’ai d’ailleurs écrit une pile d’articles à ce sujet. J’ai mis une énergie énorme à apprendre à m’organiser, à planifier, à construire des habitudes, pour garder un semblant d’ordre dans toutes les choses que je devais faire, et compenser ma gestion du temps plutôt cataclysmique.

Et ça a marché, jusqu’à un certain point. Mon entourage me voit souvent comme la reine de l’organisation. J’ai réussi à ne jamais m’attirer de gros ennuis administratifs. Par contre… que de stress, que d’efforts, que de culpabilisation à me dire que si je n’arrivais pas à faire ceci ou cela plus facilement, ça devait bien être parce qu’au fond je ne voulais peut-être pas vraiment. Quand on échoue jour après jour à “s’auto-discipliner”, difficile de ne pas se sentir responsable.

Terminer les choses

Toute ma vie, j’ai aussi eu un mal fou à terminer les choses, et à tenir des projets sur le long terme, à faire des choses maintenant en vue d’un objectif distant. J’ai bien failli échouer mes études par abandon au mémoire, tant je n’arrivais simplement pas – mais vraiment pas, c’était comme une impossibilité physique – à m’y mettre. Des idées de choses à démarrer, j’en ai à la pelle. Je démarre, je mets en route. Mais après le soufflé retombe, et ce qui était si enthousiasmant devient une chose de plus sur la liste de choses à faire. Difficile de ne pas voir ça comme un échec moral, une paresse de la persévérance, un manque de ténacité ou de volonté à faire des tâches un peu ingrates.

Une carrière sur mesure

J’ai vite compris ça, quand j’étais indépendante, et centré mon offre autour de services qui ne m’obligeaient pas à faire ce qui était si difficile pour moi: globalement, je me faisais payer pour du temps que je passais avec des gens (formation, consulting, conférences) et j’évitais les projets qui nécessitaient que je passe de longues heures “toute seule” à travailler dans mon coin, ou dont l’objectif était trop éloigné dans le futur. Ça a marché pas trop mal pendant 10 ans – mais ça m’a aussi limitée. Il y a des tas de choses que je n’ai pas entreprises, que je n’ai pas faites: je n’ai pas créé d’entreprise. Je n’ai pas écrit de livre. Je n’ai pas monté une expo photo. Je n’ai pas monté une super offre de services bien emballée avec ce qu’il fallait de marketing et d’arguments de vente. Côté biz dev, ce que j’ai fait pour moi a tout de même été passablement limité. Je me laissais porter par le flot, je saisissais les opportunités qui passaient.

Se motiver!

Le sujet de la motivation m’a toujours beaucoup intéressée, parce que c’était à travers ce prisme que je comprenais mes difficultés. J’ai beaucoup lu et réfléchi, beaucoup cherché de clés. Esclave de la récompense immédiate, je ne savais pas comment me motiver, alors que je voyais bien que j’avais une capacité immense à me plonger dans quelque chose quand j’étais, justement, motivée: j’ai ouvert un espace coworking en moins de deux mois, j’ai appris à peu près tout ce qu’il y avait à apprendre sur le diabète félin, j’étais “à fond” sur tout ce qui se développait comme nouvel outil dans les débuts du web social… Pourquoi est-ce que je n’arrivais pas à contrôler ou canaliser ça, à être quelque part entre la quasi-obsession et l’inertie?

Le lien entre mon incapacité à arrêter et mon incapacité à commencer m’était clair, mais je sais aujourd’hui qu’il me manquait un élément crucial de compréhension. J’ai appris au final que quand je sentais un élan pour faire quelque chose (même pour écrire un article pour mon blog), il fallait que je le fasse tout de suite, sous peine de voir cet élan s’éteindre et disparaître à jamais. J’ai aussi appris que cela ne servait à rien que je prévoie de préparer une conférence ou une formation à l’avance: je n’y arrivait simplement pas. Alors j’ai pris l’habitude de bloquer le jour ou deux avant pour le faire.

Moins de charge mentale

Un des facteurs qui m’ont poussée à revenir à la vie salariée après tant d’années à mon compte, c’était, outre les simples problématiques de chiffre d’affaires, le souhait d’avoir moins de charge mentale, que toutes les décisions ne dépendent pas de moi, d’avoir un regard sur mon travail. Et j’avais raison. Dans mes emplois salariés, je ne procrastine pas ou peu, je mets à profit mes compétences organisationnelle, je fais les choses – parce qu’il y a d’autres personnes qui comptent sur mon travail, parce qu’il y a un cadre qui est donné (tu viens au boulot, tu te poses à ton bureau, tu bosses), parce que souvent aussi, il y a des gens qui apprécient ce que je fais. Et ça suffit à lever la barrière. Je fais. A se taper la tête contre les murs, et à me demander pourquoi je n’arrive pas, à la maison, à faire la vaisselle après avoir mangé mon repas. Mais j’ai quand même fait deux burnouts, mine de rien, et pas passé loin du troisième.

Gestion émotionnelle

Sur un plan plus personnel, les émotions ça a toujours été un problème. Trop d’émotions, que j’ai longtemps gardées sous cloche. Des nombreuses années de thérapie m’ont aidée à en avoir moins peur, à les apprivoiser, à savoir quoi en faire. Et à nouveau, pour beaucoup de personnes de mon entourage, j’ai une “sagesse émotionnelle” et une compréhension des émotions que beaucoup n’ont pas. Parce que je n’ai pas pu faire autrement.

Mais malgré tout ça, j’ai continué à galérer avec des problèmes de gestion émotionnelle que je n’arrivais pas à dépasser. Quelqu’un se parquait sur ma place de parc, ou quelqu’un disait quelque chose sur facebook, et ça m’était impossible de “lâcher la chose” avant de l’avoir résolue. J’en perdais des demi-journées voire des journées entières de travail. J’avais l’impression d’être à la merci de la moindre contrariété, qui ferait voler en éclats tous mes beaux projets de faire ceci ou cela ce jour-là. Je parlerais peut-être une autre fois de ma vie sentimentale, mais elle a été la victime de ces mêmes difficultés de “trop d’émotions”.

Procrastiner le coucher

J’ai aussi toujours eu du mal à me mettre au lit. C’était comme si, plus j’étais fatiguée, moins j’arrivais à me coucher. Je le voulais, pourtant. J’étais raide! Mais je “procrastinais le coucher”. Alors OK, j’avais peut-être des peurs d’enfant autour de dormir, de mourir pendant la nuit, mais vraiment, c’était surtout que je me retrouvais prise dans une autre activité, pas toujours excitante ou intéressante, et que je n’arrivais simplement pas à me “bouger” pour me mettre au lit. Vraiment, je me disais: zéro auto-discipline. Il y a de quoi se sentir vraiment nulle.

De pire en pire

Ces dernières années, j’ai eu le sentiment que ces difficultés ont empiré. Peut-être que ce n’était que l’effet du temps qui passe, un peu l’âge aussi, la lassitude de rester coincée toujours devant les mêmes échecs, malgré le travail sur moi, malgré mon envie que ça change. Je finissais par me dire, pour de vrai, il y a vraiment quelque chose qui ne tourne pas rond chez moi. J’avais toujours eu cette impression, une grande crainte au fond de moi que je ne laissais pas trop monter à la surface, qu’il y avait chez moi quelque chose de “cassé”. Mais bon, tout le monde se sent un peu comme ça face à ses échecs, non?

Mon impression générale était que la vie était juste beaucoup plus difficile pour moi que ce qu’elle aurait dû être. Malgré mon intelligence, mes compétences, mes qualités (que je ne mettais pas en doute en mon for intérieur), je n’arrivais quand même pas. Est-ce que vraiment c’était normal d’être aussi épuisée juste à tenter de gérer le quotidien domestique, alors qu’en plus, je ne travaillais même pas? J’avais envie de plein de choses, plein de projets, mais quand j’en avais le temps, me bouger était une montagne tellement insurmontable que je n’avais plus envie de rien et que je restais à glandouiller. Et je n’étais pas déprimée. J’avais un point de repère, pour ça, et ce n’était pas ça. Je l’ai dit comme ça parfois: “J’ai du mal à faire. C’est comme si c’était super difficile pour moi de faire.

L’extérieur et l’intérieur

Je vous raconte tout ça pour poser le contexte. Toutes ces difficultés de vie, pour l’essentiel, je les ai vécues en privé. Les gens voient ce que j’ai accompli, ce que j’ai fait, me voient quand je suis en contact avec d’autres gens (eux, déjà!) mais pas quand je passe une journée entière à ne pas arriver à faire une petite chose que j’avais décidé que je ferais. Pas quand c’est le week-end et que je n’ai envie de rien alors qu’au fond j’ai des tas de projets et le sentiment de n’avoir jamais le temps, et que là, je l’ai, le temps, mais je n’arrive rien à en faire. C’en était désespérant. Et ce qui était particulièrement désespérant aussi, c’était de ne pas réussir à savoir si j’étais en train de me plaindre pour rien (tout le monde procrastine, au final, tout le monde est fatigué, oui la vie est difficile et pleine de contrariétés) ou si vraiment il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond chez moi. Parce que bon, je m’en sortais quand même pas mal dans la vie, hein. Quand je partageais mes problèmes, beaucoup de gens semblaient s’y retrouver, mais pour une raison qui m’échappait, ça ne semblait pas forcément leur poser autant de problèmes qu’à moi. Ça a duré des années, et des années, et des années encore.

Spoiler: il y avait vraiment quelque chose qui ne tournait pas rond chez moi. C’était vraiment pas normal de galérer autant. 

Epiphanie

En août, je suis tombée sur un article qui parlait du sous-diagnostic d’un certain trouble neuropsy chez l’adulte. J’ai commencé à le lire sans intérêt particulier autre que ma curiosité générale pour tout ce qui touche au fonctionnement humain, parce que je ne me sentais pas du tout concernée. Mais au fil de l’article, je ne pouvais pas ignorer qu’ils étaient en train de décrire toute une ribambelle de problématiques et caractéristiques dans lesquelles je me retrouvais:

  • procrastination chronique
  • difficulté à s’en tenir à ce qu’on a prévu de faire ou planifié
  • toujours envie de chercher ou d’apprendre de nouvelles choses
  • capacité à se focaliser à fond sur quelque chose, en ignorant tout le reste
  • souvent sous-employé par rapport à ses capacités, ou en train de galérer dans un job à la hauteur de ses compétences
  • tendance aux comportements addictifs (avec ou sans substances), sports à émotions fortes
  • attrait pour des professions stimulantes (pompier, secouriste par exemple, ou demandant beaucoup d’apprentissage ou de réflexion)
  • un problème lié à un déficit de dopamine et de noradrénaline (deux neurotransmetteurs qui interviennent dans les circuits de motivation et de récompense)

Ça a suffi à m’interpeller. Me questionner. J’en ai parlé à mon entourage, d’abord précautionneusement, puis avec un peu plus de certitude. Certains étaient poliment dubitatifs (“à ce moment-là, moi aussi” ou bien “ouais mais bon tout le monde a ces problèmes”), d’autres m’ont dit “mais bien sûr que tu es comme ça, tu ne savais pas?!” ou encore “ah oui, c’est en effet pas normal d’avoir autant de difficultés…”

Plein de pièces de puzzle

J’ai trouvé un questionnaire d’auto-dépistage (un vrai, celui qu’utilisent les psys) et je me suis retrouvée avec toute une série de croix “dans la zone grisée”. De plus, début 2019, j’avais fait une expérience étrange avec un antidépresseur (post-burnout) qui avait eu un effet quasi magique sur mes difficultés à faire des choses. En creusant un peu, j’avais découvert que ce médicament augmentait aussi la concentration de noradrénaline dans le cerveau, un des neurotransmetteurs qui pose problème dans le trouble en question. Dingue! J’ai rejoint des groupes facebook, j’ai parlé avec des gens concernés, j’ai regardé des conférences et lu des articles.

Très vite, c’était comme si les pièces de puzzle manquantes de ma vie commençaient à tomber en place. Tellement de choses s’expliquaient! Tout ce qui coinçait encore dans ma vie et m’empêchait d’avancer s’expliquait. Et avec cette explication, il y avait aussi l’espoir d’un changement, à travers une prise en charge spécifique.

Diagnostic

J’ai vite pris les devants pour trouver un spécialiste (malgré le scepticisme de ma psychiatre traitante) pour avoir un diagnostic – ou pas. J’y suis allée la peur au ventre, j’avoue. Cette hypothèse expliquait tellement de choses, mais j’avais tellement peur de me tromper, d’avoir été victime de l’effet Barnum (qui fait qu’on se reconnaît dans des descriptions un peu générales qui pourraient finalement coller à n’importe qui). J’ai beaucoup douté pendant les deux mois d’attente pour ce rendez-vous. C’était un peu “schizophrène”, entre soulagement de savoir enfin (je croyais avoir trouvé) et peur terrible de me tromper et de me retrouver au final sans porte de sortie.

Mais ça a été vite réglé. Après une séance d’intense discussion et une bonne heure passée à mettre des croix dans beaucoup de questionnaires, le spécialiste a confirmé mon “auto-diagnostic”. Je suis ressortie du deuxième rendez-vous avec la référence d’un livre spécifique pour m’aider à affiner mes stratégies de compensation (car j’en avais déjà beaucoup), et une ordonnance.

Prise en charge

Il y a un mois, j’ai donc commencé à mettre en pratique ce que je lisais dans ce livre (extrêmement bien fait, pragmatique, et écrit pour que ce soit facile à mettre en oeuvre). A chaque page, je comprenais mieux pourquoi telle ou telle chose était difficile pour moi, et comment contourner cette difficulté. Je voyais que j’étais déjà vraiment sur de très bonnes pistes avec ce que je faisais pour “me gérer”, mais il me manquait ici et là des morceaux pour que ça marche vraiment bien. C’était un tel soulagement d’avoir enfin une aide et des explications spécifiques à ma problématique.

Une semaine plus tard, début décembre, j’ai commencé les médicaments. Avec un peu de trépidation, évidemment. Ça aide pour beaucoup de gens, pas tout le monde. Certaines personnes ne les tolèrent pas. J’avoue qu’après mon expérience imprévue avec l’antidépresseur à inhibition de recapture de noradrénaline, j’avais bon espoir que ça m’aide. Je n’ai pas été déçue. Les médicaments ne sont évidemment pas magiques, mais c’est comme du fart sous les skis. Ça rend les choses beaucoup plus faciles.

Passer de l’intention à l’action

Une des manifestations générales du trouble en question est une difficulté à passer de l’intention à l’action. Je reviendrai là-dessus dans un autre article, mais une fois qu’on a compris ça, tout s’explique. Avec les médicaments, c’est juste plus facile de faire. Je pose une assiette dans l’évier, “ah ben tiens je vais aussi la laver pendant que j’y suis”. J’ai décidé qu’à telle heure j’allais faire telle chose, eh bien, sans gros effort, je m’y tiens. Il y a d’autres effets aussi, très très intéressants, qui feront l’objet d’un autre article, mais en gros, ça veut dire qu’avec les médicaments, j’arrive beaucoup plus facilement à réellement mettre en application ce que j’ai dans ma boîte à outils pour gérer la vie.

Le résultat de tout ça, c’est que depuis un mois environ, ma vie a vraiment changé. J’arrive à faire ce que j’ai prévu de faire. Je passe de bonnes journées. Je reprends confiance en moi. Je commence à entrevoir qu’un jour il me sera possible de faire des choses en vue d’un objectif à moyen ou long terme. Ma charge mentale a fondu comme neige au soleil.

C’est vraiment le début de la suite de ma vie.

Mais alors, c’est quoi?

Si je n’ai pas entamé cet article avec le nom du trouble qui m’a été diagnostiqué (et qui concerne, à des degrés divers, un adulte sur 20 ou 25), c’est parce que ce nom charrie de nombreux préjugés, et qu’il est – je ne suis pas la seule à le dire – assez mauvais. Ma mécompréhension de ce trouble, certainement basée sur son nom et les idées reçues qui circulent à son sujet, a clairement retardé mon diagnostic et ma prise en charge, et m’a valu plusieurs années de galère personnelle en plus. Je voulais donc raconter mon histoire d’abord, que vous ayez l’occasion de la découvrir sans les lunettes déformantes de l’étiquette que peut conférer ce diagnostic.

J’ai un autre article prévu dans la pipeline pour parler plus en détail de cette histoire de nom et des idées reçues, mais je ne vais pas vous laisser en suspens d’ici là. Le truc qui fait que j’ai du mal à faire les choses, à passer de l’intention à l’action, que ma gestion émotionnelle est un peu bof, que je suis comme prise dans l’immédiat du présent, que tout m’intéresse, que je déborde d’idées et de projets mais que je n’arrive rien à finir, que je suis créative et que je parle peut-être un peu trop, que je peux me plonger dans un truc et abattre un boulot énorme en un rien de temps ou devenir une experte de quelque chose que je ne connaissais pas, en gros, ce truc “qu’ont” les personnes comme moi qui ont une fonction exécutive pas top, on appelle ça un TDAH. Oui, le fameux Trouble du Déficit de l’Attention avec/ou sans Hyperactivité.

Ça vous fait quoi?

Peut-être que vous étiez familiers avec ce trouble et que vous saviez de quoi je parlais dès le début de cet article. Peut-être que, comme moi avant, ces quatre lettres évoquent “court partout et n’arrive pas à se concentrer plus de 2 minutes”. Peut-être que ça vous paraît très étonnant de me voir concernée par ce diagnostic, ou au contraire, pas du tout. Peut-être que ça vous dit vaguement quelque chose, mais que ces histoires de “trouble d’attention” ou “d’hyperactivité” c’est vraiment à la périphérie de votre conscience, un truc dont on n’est même pas vraiment sûr si c’est “pour de vrai” ou un machin à la mode un peu inventé de toutes pièces pour excuser une mauvaise éducation, la paresse, ou trop de complaisance envers soi-même. Peut-être que vous vous reconnaissez dans mon histoire, peut-être un peu trop pour votre confort, et que vous êtes en train de vous demander, entre sueurs froides et lueur au bout du tunnel, si vous aussi, non mais quand même, je saurais si j’avais ça…?

Toutes ces réactions sont légitimes. Les commentaires sont ouverts, et mes MP/Whatsapp aussi. En attendant d’écrire plus sur le sujet (et sur cette période charnière de mon parcours de vie), je vous laisse avec quelques liens si vous souhaitez creuser un peu:

Taming the Dishes, 2021 Version [en]

If you know me just a little, you’ll know that doing my dishes is an everlasting challenge. It’s not that I hate doing it so much (I’d have got a dishwasher years ago). It’s just that… it never seems important to do it now, and then it piles up, and it’s the thing I constantly feel bad about not doing, so I tend to push it away.

My dishes have been under control for some time now and I thought I’d share how I did it. Worked for me, not sure it will work for you, but the underlying method is something you might find interesting.

Background

I was inspired by what I’m learning at my training at the IGB (it’s the brief therapy approach developed at the Palo Alto Mental Research Institute back in the days).

To sum things up (too) briefly, the general strategy is the following: when faced with a problem one is stuck with, trying and trying to solve one’s way out of it, the obvious conclusion is that what is being tried is not working – otherwise the problem would not be there anymore. Worse, what is being tried is actually keeping the problem alive or making it worse; if that were not the case, chances are the problem would go away at some point. If it remains despite all our efforts to get rid of it, then we are unwittingly participating in its persistance.

The “simple” solution is to identify what it is that we are doing which makes the problem worse, or at least maintains it, and stop doing it. It is not easy, firstly because we are generally unaware of our participation in the systems we are part of, and second, because if we are doing what we are doing, it is because on some level we firmly believe it is a solution to the problem at hand.

The “simplest” (again, not “easy”) way of not doing something is to head in a radically opposite direction, and do something that is incompatible with what we desire to stop. Think “U-turn”. This is very tricky to think through, and even trickier to implement (this is where the hundreds and hundreds of hours of training to become a therapist come in), and leads to these weird and counter-intuitive paradoxical prescriptions: instead of trying to stop doing x, do more of it!

Addictive/compulsive behaviours

So, to get back to our dishes, I had just come out of a couple of days of training where we had discussed some “typical” ways to deal with addiction/compulsion issues and – very much related though maybe not obvious at first glance – procrastination. Generally, in situations where excessive consumption (of all nature) is problematic, our attempts to get out of it take the shape of “stop it”, or “do less”. Like “I have to stop smoking”, or “I have to eat less chocolate”. Well, we all know how well that works, don’t we? So, how do we stop doing that? How do we stop telling ourselves to not smoke, drink less, etc., when our goal is precisely to stop smoking or excessive drinking?

Well, in this case, the prescriptions will have to go in the other direction: “smoke more”, “eat more chocolate” – but of course, not in any crazy way, because we do not want to abandon the goal of getting the excessive consumption under control. For example, one classic prescription is of the form “do it once, do it x times”: instead of trying to stop smoking, have a rule that each time you smoke one cigarette, you have to smoke 5. Or each time you drink a glass of wine, you finish the bottle. Of course all this needs to be tailored to the specific situation and the person, but the way it works is the following: it “breaks” the mechanism of fooling oneself that one can smoke/drink/eat “just one” (assuming that is the problem). “Oh, I’ll just eat one bowl of ice-cream!” And three bowls later: “Heck, I really need to stop eating ice-cream.” See the idea?

Procrastination

Now, what does this have to do with procrastination, you will ask me? Procrastination is actually very similar in its underlying mechanism. But instead of “I’ll do it just once” it’s “I’ll not do it just once”. “I’ll do it tomorrow” is in fact “I’ll just skip doing it today.” Procrastination is telling ourselves that it doesn’t matter if we don’t do the thing just now, because we will (for sure!) do it later. So we apply a similar but opposite prescription: “if you don’t do it once, don’t do it x times.” Or, in positive terms: “skip it once, skip it x times”.

Let’s take an example. Say I’m trying to write my dissertation or prepare a class. I’ve decided I was going to work on it each day for 2 hours. What usually happens is that I don’t manage to get to work on it today, I get sidetracked, or I feel off, and I think “oh well, I’ll skip today and do it tomorrow.” And tomorrow, the same thing happens, and it gets worse and worse. Sound familiar? Now, if I have a rule that if I skip one day, then I am not allowed to get back to work on it for another 4 (e.g.) days, how will that make me feel? Can you feel the tension increasing?

Applying this to my dishes

This is very much what happens with my dishes. It’s the evening, I’m tired, I look at the sink and think “meh, I’ll do this tomorrow”. But then, as we all know, tomorrow brings more dishes and even less desire to deal with them and even more “meh, I can’t deal with this now, I’ll do it tomorrow, for real.”

This is what I came up with:

If I don’t do the dishes, I can’t do them for the next three days.

I came up with three days because it’s scary enough for me to be a deterrent, but not so much that it makes things impossible. For example, if I’d said “10 days”, that would not work for me because it’s just not tenable to not do the dishes for 10 days. Three days works for me because I know I have no desire whatsoever to have to deal with three days of dishes. Your mileage may vary, if you try this.

More than once, I have found myself in the evening in front of the days dishes thinking “meh, I really don’t want to do this” – but right after, I picture the three days of dishes that not doing it tonight will imply, and I get to work.

Soon after I started with this, I found myself in the evening thinking “oh, the dishes!” only to realise I had already done them. Now that I’ve been at this for a few months, I can feel it’s turning into a habit like brushing my teeth before bed is. I “don’t feel right” if I haven’t done it.

Some concrete details:

  • “do the dishes” means I wash everything that needs washing at that moment and see the bottom of the sink
  • I don’t dry things, and haven’t got a system in place for putting clean dishes away yet (thinking about it)
  • because “things happen”, I have built some flexibility into the system (because it works for me without endangering the system): I am allowed an “exception” every now and again (imagine: guests or a lot of cooking in the evening so really too tired to deal with it) but the condition is that I must catch up  the next day. I’m aware that with this system I could end up doing dishes every other day, but it’s not the case, and if it were, I would change this “exception clause”
  • I’m now starting to think it would be nice to do dishes earlier in the day too, so there is less in the evening. This is not a “goal”, but more of a drive, I’m starting to want to do dishes during the day.

So there we are. My dishes seem tamed. What is there in your life that you might try applying this approach to? Let me know in the comments!

Implicite [fr]

Il y a deux couches au langage. L’explicite et l’implicite. L’indice, et l’ordre. L’indice, c’est l’information que contient ce qu’on dit. L’ordre, c’est ce qui est dessous, et qui touche à la dimension relationnelle de l’acte de communication.

Quand je dis “j’ai faim”, à la surface je donne une information, mais il y a aussi une dimension qui touche ma relation avec la personne à qui je dis ça: peut-être que je lui signifie ainsi qu’elle doit faire à manger, ou m’apporter une pomme. C’est “l’ordre”.

Cet implicite, on le comprend dans le contexte de la relation à l’autre. Et on ne va pas tous “recevoir” ces implicites de la même façon. Certaines personnes vont ne pas entendre l’implicite, ou passer à côté, alors que d’autres sont sursensibles aux implicites et vont en entendre là où il n’y en avait pas.

Par exemple, la personne à qui je dirais “j’ai faim” (“j’ai faim, je vais partir manger dans quelques minutes”) mais qui comprendrait que j’attends qu’elle me prépare un petit plat (si c’est une collègue, elle pourrait trouver ma “demande” déplacée…).

C’est toujours utile de garder en tête qu’il y a ces deux couches dans ce qu’on dit, et que le relationnel se joue dans la couche la plus propice aux malentendus.

Canicule: petit rappel annuel pour ne pas se liquéfier dans son appart [fr]

[en] When faced with a heat wave: close your windows completely as soon as the outside temperature is higher than the inside temperature! "Air" doesn't make things cooler, it just gives you a feeling of coolness while your open window lets hot air from the outside come and heat your flat. As soon as the air outside is cooler than inside, open everything! Also, don't let the sun shine inside. Use a fan if you like "air".

Je fais un peu le disque rayé sur le sujet, tant que parfois j’ai un peu l’impression de pisser dans un violon. Mais qu’importe. A force, je serai peut-être entendue.

  1. Ouvrir ses fenêtres quand il fait plus chaud dehors que dedans ne vous rafraîchit pas! L’air chaud du dehors entre, et réchauffe l’intérieur.
  2. “L’air”, à savoir le vent, ne procure qu’une sensation passagère de fraîcheur. Ça ne refroidit pas l’air ambiant. Utilisez un ventilo pour “faire de l’air”!

Quand il fait très chaud dehors, qu’on n’a pas de clim, et que nos apparts ne sont pas conçus pour les grosses chaleurs (on vit pas en Inde), il vaut la peine d’appliquer quelques principes pour rester au frais (relatif). Et pour comprendre, je me rends compte, il faut quelques notions élémentaires de physique.

La chose clé à comprendre c’est que la “température” va avoir tendance à s’égaliser dans l’espace occupé par le gaz ou le liquide auquel on s’intéresse. Notre air ambiant est un gaz. Alors évidemment c’est pas parfait (si en hiver je n’allume le radiateur que dans une pièces, les autres vont avoir de la peine à chauffer), mais c’est quand même une tendance.

Donc, même s’il y a une petite brise dehors et que quand on ouvre la fenêtre ça fait un peu d’air (bienvenu), ou si on a la chance d’avoir un appartement traversant et qu’on peut faire “tirer”, il faut avoir conscience qu’en procédant ainsi on accélère le réchauffement de l’appart. C’est un peu comme si dans une baignoire d’eau tiède on rajoute de l’eau bouillante pour “faire circuler l’eau”. Ça va finir par devenir chaud.

L’autre chose à comprendre c’est que la sensation de frais que donne le vent sur la peau joue (en particulier) sur notre capacité à transpirer. Le vent déplace la petite couche d’air juste au-dessus de notre peau et la remplace par de l’air plus sec, favorisant l’évaporation de notre transpiration, et par la même occasion, nous rafraîchissant. Car l’évaporation de l’eau est un processus physique qui refroidit. C’est pour ça qu’on transpire. Je schématise, hein.

Donc si on vous souffle dessus avec de l’air un peu plus chaud que l’air ambiant, vous allez sur le moment vous sentir mieux, mais il ne faut pas oublier qu’on rajoute de l’air chaud au “mélange” dans lequel vous allez devoir tenir jusqu’au soir!

Il faut garder en tête aussi que les animaux domestiques (chats, chiens) ne transpirent pas comme nous. Le chien se rafraîchit par la langue, en haletant, par exemple. (Si un chat halète, à moins que ce soit un jeune surexcité qui a trop joué, on est en détresse respiratoire => urgence véto.) Le chat transpire par les coussinets, et c’est à peu près tout.

Le ventilateur ou “l’air” va donc bien moins soulager votre animal que vous! Il ne va pas avoir cette sensation de “fraîcheur” qu’amène le courant d’air.

A plus forte raison si vous avez des animaux chez vous, il est impératif de faire tout votre possible pour que la température objective (qu’on mesure avec un thermomètre) soit la plus basse possible chez vous.

Comment on fait? C’est assez simple:

  1. Dès qu’il fait plus chaud dehors que dedans, sans tenir compte du “vent”, fermer toutes les fenêtres.
  2. Dès que le soleil menace de briller à travers une fenêtre, baisser le store.
  3. Dès que la température extérieure chute et devient plus basse que la température intérieure, ouvrir les fenêtres.
  4. Pour avoir de “l’air”, utilisez un ventilateur, pas la fenêtre ouverte.

Quelques remarques:

  • Pour savoir s’il fait plus chaud dehors ou dedans, rien ne vaut un thermomètre (surtout s’il y a “de l’air” dehors, qui peut vous donner une fausse impression de fraîcheur).
  • En l’absence de thermomètre, étendre un bras nu par la fenêtre et tenter d’évaluer (à nouveau, attention au vent).
  • Parfois, si votre appartement donne sur plusieurs façades, l’air extérieur d’un côté pourra être plus frais que dedans (fenêtre à ouvrir) alors que l’air de l’autre côté sera plus chaud (fenêtre à fermer).
  • La nuit, ouvrez les stores et les fenêtres, mettez une chemise de nuit et un masque!
  • Vous allez vouloir fermer les fenêtres quand la température intérieure est au plus bas. Parfois c’est à 6h du matin! Jetez un oeil sur les courbes de température des prévisions météo, ça peut vous aider.
  • Attention, le moment de la température extérieure la plus basse n’est pas forcément le moment de la température intérieure la plus basse (c’est celle-là qui compte). Un thermomètre digital qui indique les extrêmes peut aider à savoir si on est “en montée” quand on se réveille, ou pas encore.
  • La température va monter au fil de la journée, parce que l’immeuble chauffe. Cela ne signifie pas que cette stratégie est mauvaise! Il fera toujours moins chaud qu’avec les fenêtres ouvertes. (Votre frigo, votre ordinateur, votre télé, tous vos machins électroniques ainsi que les êtres vivants dans l’appart vont aussi faire augmenter sa température.)

Bon courage et restez au frais!

Addendum: ne pas oublier les stratégies de “refroidissement personnel”: douche fraîche sans se sécher, mettre des habits humides, se mouiller les cheveux, cold pack sur la nuque, etc etc… ça ne fait pas baisser la température de l’appart mais ça aide à ne pas se liquéfier!

 

Routine, mon amie [fr]

Je réfléchis beaucoup à la routine, ces temps. Et je fais ma vaisselle. Ceux d’entre vous qui me lisez depuis des années (des décennies pour certains! mon dieu, j’ai laissé passer sans mot dire les 20 ans de CTTS, il y a 4 jours! va pas falloir que je me rate en 2030, dites donc…) savez que la vaisselle, c’est un thème récurrent chez moi. Comment la faire, ce qu’elle signifie quand elle n’est pas faite, une pointe d’iceberg “indicateur” de plein d’autres choses dans ma vie, débordant plus ou moins de l’évier.

Donc, je réfléchis à la routine, et ma vaisselle est sous contrôle, pour la première fois depuis des années. Ma vie aussi, dans l’ensemble – je crois que la dernière fois que je me suis sentie aussi “on top of things” de façon générale, ça devait être en 2009. (De mémoire.)

Ma tendance naturelle est de fuir la routine, dans laquelle j’ai peur de m’enliser. Du coup je recherche plutôt la nouveauté, l’excitation, l’imprévu, la spontanéité. Adolescente, ma vie était remplie et programmée. Sauf l’été, souvent long et vide (en-dehors des vacances en famille, toujours de bons souvenirs) et dans lequel je finissais par m’ennuyer à déprimer. Du coup, je pense que remplir ça me convenait bien. Jusqu’à ce que je finisse par craquer un peu, et à un moment donné, jeune adulte, j’ai plus ou moins tout envoyé valser, pour être libre, ouverte à l’imprévu, spontanée. Mais bon, ça ne m’avait pas empêcher de prendre plus de 30 périodes de cours durant ma première année de Lettres. On ne se refait pas.

Je pense que mon année en Inde a fini par sceller le sort de ma déstructuration du temps. Là-bas, il vaut mieux ne pas trop s’organiser, si on ne veut pas péter un câble. Ni faire trop. De retour en Suisse, j’étais devenue incapable d’être à l’heure. Je me suis ressaisie, évidemment (le sang de la Vallée de Joux coule dans mes veines, tout de même), mais je suis restée la reine du plan last-minute et de l’improvisation. Le rythme de vie suisse m’a rattrapée, je recommencer à remplir mon agenda, mais durant la longue décennie que j’ai passée à mon compte, j’ai vécu une vie sans beaucoup de rythme. Ou alors, si on veut, au rythme changeant et imprévisible.

Je savais bien que j’avais besoin d’un peu de régularité et de cadre. Un peu, mais pas trop. J’ai parlé de ça ici, au fil des années, mais j’avoue avoir la flemme de déterrer les articles. N’ayant que le peu de contraintes que je m’imposais à moi-même (pas beaucoup), essayant de suivre mes humeurs et mes envies (après tout, j’étais à mon compte pour “faire ce que j’aime”), je me suis quand même vite trouvé avec un problème de procrastination exacerbé (pas nouveau dans ma vie, mais il a bien poussé durant cette période) et une incapacité à poursuivre beaucoup de projets et d’envie personnels parce que… je n’arrivais pas. Je voyais bien que quand j’étais plus occupée, je me sentais mieux, et entre autres choses, un élément qui m’a poussée à redevenir salariée après des années d’indépendance était le besoin de soulager un peu ma charge mentale en passant à un mode de vie où une partie du cadre me serait donné d’office. Et d’ailleurs, ça a marché.

Ces derniers mois, j’ai fait des petites révolutions dans ma vie et ma façon de fonctionner au quotidien. J’ai réalisé (mais vraiment, profondément réalisé) que je pouvais faire des choses parce que j’avais décidé de les faire. Cela peut paraître bête, mais c’était toujours un gros problème pour moi. Je me disais “demain je fais x”, et le moment venu, je n’avais pas envie, ou pas le moral, ou mieux à faire, et j’envoyais balader. Du coup j’ai fini par construire une image de moi-même où j’étais incapable de me “discipliner”, ou de tenir mes engagements vis-à-vis de moi-même. Pour quelqu’un d’autre, aucun problème! Mais pour moi… aïe aïe aïe.

En fait, j’ai compris que si je ne voulais plus courir et vivre à l’arrache, si je ne voulais plus passer des jours et des semaines à culpabiliser parce que je procrastinais, je pouvais faire deux chose: m’organiser (être proactive) et mettre en place des routines et habitudes, pour diminuer la nécessité de décider. Il y a eu un déclic, parlant avec une copine, qui m’a fait réaliser que les personnes “disciplinées” ne l’étaient peut-être pas naturellement, comme ça, sans effort, mais qu’elles se tenaient à leurs décisions ou leur organisation car elles savaient que c’était nécessaire pour leur équilibre ou leur bien-être. Ça a été une révélation pour moi. Ça a été une révélation pour moi.

Ça ne s’est pas mis en place tout de suite, il a fallu entraîner et consolider (je consolide encore). Le premier pas, ça a été de décider chaque jour d’une chose que j’allais faire le lendemain, prise sur ma liste de tâches en souffrance. Des petites choses. Et je me suis retrouvée dans cette situation étrange de n’avoir pas fait la chose en question arrivé le soir, et de me dire “ah, mais j’ai décidé que je le faisais, alors je vais le faire maintenant”. Alors qu’il y a encore quelques mois j’aurais dit “mince, encore une fois je ne l’ai pas fait”. Au niveau de ma planification de tâches au jour le jour, ça m’a fait passer de “liste des choses que je veux/dois/espère/pense que je devrais arriver à faire aujourd’hui” à “petit nombre de choses que je peux garantir que je vais faire”. En quelques jours, au lieu d’être en échec constant, j’ai commencé à prendre confiance et me sentir beaucoup mieux.

La routine, c’est quelque chose qui est sur mon radar depuis FlyLady. Là, ça s’est mis en place un peu tout seul, progressivement. Déjà, mettre un réveil le matin (chose que je fais assez naturellement, même si je me réveille généralement avant). Aller me coucher à une heure raisonnable (l’objet d’un autre article). Me lever, faire le lit, médics des chats, les miens, déjeuner sur le balcon, etc. Le contenu n’est pas important. C’est l’existence de la structure qui compte.

Ma tentation naturelle, ça a été de vouloir tout “routinifier”. D’organiser ma semaine à coups de “lundi je fais ça, mardi je fais ça, mercredi, jeudi, vendredi”. Et j’ai compris qu’il fallait y aller progressivement. Parce que l’autre Grande Mission de cette année 2020, pour moi, c’est d’apprendre à mettre un peu plus la priorité sur moi et mes besoins. Pas difficile de faire plus que quasi rien, me direz-vous. A force de mettre les besoins des autres toujours avant les siens, on finit par disparaître. Donc: structurer une partie de mon temps tout en gardant une large part “pour moi”. Le Chemin du Milieu est rarement facile à trouver, mais là, je trouve que je ne m’en sors pas trop mal.

J’ai commencé par poser une chose dans ma semaine. Deux heures de temps, dans l’agenda, pour m’occuper d’un projet. La même plage horaire, le même jour, chaque semaine. Et m’y tenir! Maintenant que j’ai un peu pris l’habitude, ça va, mais au début ce n’était pas évident. J’étais toujours tentée de déplacer/annuler/déprioriser pour autre chose. Et j’ai fait plusieurs semaines comme ça, avec juste une chose dans l’agenda, avant de progressivement, petit à petit, rajouter d’autres éléments pour structurer ma semaine. Il faut dire qu’après six mois de chômage (où je n’étais pas en très bon état dans ma tête, pour tout un tas de raisons – j’ai peut-être mentionné que j’avais eu une année ou deux de merde?) suivis par six mois d’incapacité de travail post-op, on ne peut pas reprendre du jour au lendemain un rythme effréné. Surtout si le but est de construire un nouvel équilibre, un peu plus durable.

Du coup, j’ai de la routine: dans ma journée, dans ma semaine. J’avoue que ça m’émerveille. Parce qu’elle ne tient qu’à moi, mais que je m’y tiens néanmoins. Quand je vacille, c’est quelque chose auquel je peux me raccrocher. Et que je cherche à ne pas lâcher dans les périodes où je ne vacille pas (la tentation est grande). Le “confinement” (à la suisse) est arrivé à pic, pour moi: il m’a permis de prendre goût à me donner plus de place.

Je pense que notre rapport à la routine, à la structure, à l’organisation, ça dépend beaucoup de notre personnalité et de notre parcours de vie personnel. Il y a des gens qui sont emprisonnés dans des habitudes et un quotidien dont ils ont désespérément besoin de sortir; d’autres qui se recroquevillent sur la répétition et le contrôle; d’autres encore qui sont allergiques à tout ce qui pourrait les contraindre de près ou de loin, et se perdent. Je pense que souvent, c’est multi-couches. Comme moi, qui suis tiraillée entre une envie d’ordre parfait et une autre de liberté absolue.

Quelque part au milieu, il y a la sérénité. Relative.

Letting Go [en]

For pretty much all my life, I have struggled with how I react to people being wrong. “Wrong” meaning, here, “wrong according to my beliefs/knowledge“. The frontier between beliefs and knowledge is murky, and we would all fancy our beliefs to be knowledge, but in some cases we can more or less agree on what is belief and what is knowledge.

I have a really hard time with people who are wrong. Wrong, of course, as described above. I have my beliefs and values, and do my best to accept that not everybody shares them. I don’t believe in any god, some people do. That’s fine, as long as beliefs are not construed as facts or knowledge.

When debating, I have very little tolerance for the “well, it’s my point of view/opinion” argument – systematically offered as a justification for something that was initially presented as fact. You can have opinions and beliefs, but if you present them as facts in a debate, prepare for them to be challenged. But as I said above, the frontier is sometimes murky, particularly as seen “from the inside”, and that is where trouble lies.

Take vaccines. I’m taking that example because it’s easy. I believe things about them. I consider those beliefs pretty rational as they are, to the best of my efforts, based in science. So I know they are safe, I know they work, I know they do not generally offer 100% protection, I know there can be a tiny risk of bad reaction, I know they have helped eradicate some illnesses and control others so they do not rip through society like Covid-19, I have a decent understanding of how a vaccine is built, how and why it works. So, of course, I think that people who believe different things about vaccines, like that they are harmful or even dangerous, are wrong. The problem is that in their “web of belief” (read the book, it’s wonderful), their beliefs are perfectly rational and therefore, knowledge.

We could say that each side of the argument here sees their belief as knowledge, and the other’s as belief.

Faced with somebody who believes something that contradicts something I know, my initial impulse is to explain to them that they are wrong. Because who doesn’t want to be right? I bet you can see how that strategy doesn’t really work out well.

So, over time, I have learned to bite my tongue, accept that what people believe (including myself, though I hate the idea) is never going to be completely objectively rational, and remember that nobody (first of all me) likes being told they are wrong. The tongue-biting is more or less successful, depending on the topic in question, my mental state, and who is facing me.

The current pandemic has given me a golden opportunity to work on not only my tongue-biting, but acceptance of differing viewpoints. Accepting that people see things differently doesn’t mean I believe every point of view is equivalent. Quite the contrary. It’s more about accepting that people will believe what they believe, that they aren’t rational (me neither, though I try my best to be), and that it is normal and OK.

I do my best to share accurate information. I’m not perfect or blameless, but I try to exercise critical judgment and be a reliable source of information for those who choose to dip into my brain, though facebook, this blog, or conversation. I also try to correct erroneous information, and that is where things get slippery. It goes from setting the record straight when people share obvious hoaxes or urban legends (generally by instant messenger), providing critical sources when others share scientifically wobbly information (hydroxychloroquine) or scare themselves needlessly (what use masks really serve, disinfecting groceries). And I’ve had to learn to back off. To keep the peace, to preserve relationships that I otherwise value, and also to preserve my sanity and inner peace.

One milestone was when I realised it was useless trying to tell people who were convinced a certain French scientist had found the miracle cure for Covid-19 that the scientific evidence for it was flaky at best, dishonest at worst. People are scared and will believe what helps them. We tend to want to ignore the emotional dimension of our beliefs, but it’s there, and much more powerful than our rational brain (as anybody who has ever tried to reason through emotions knows).

Some people are more comfortable dealing with uncertainty than others. Some people understand logical fallacies and cognitive bias better than others, and are more or less able to apply that knowledge to the construction of their beliefs (critical distance). But we all have emotions and they colour what we are likely to accept as fact or not, whether we like it or not.

So I tried to drop hydroxychloroquine. That meant I had to accept that (according to my knowledge) false information was going to do the rounds, in my social circle, that people were going to have false hopes, and spread misinformation, and I wasn’t going to do anything about it. Not an easy thing to let go of. I feel like I’m skirting responsibility. My therapist would certainly tell me that fixing other people’s beliefs is not my responsibility…

I’ve been doing the same thing for some time now with people who believe vaccines aren’t safe or efficient. I know facts don’t change people’s minds. Worse, debate reinforces beliefs. I know! But I don’t really believe it, and keep on wanting to try. So I bite my tongue, remember that for the person facing me their belief is perfectly rational, remind myself that telling them they are wrong or debating them will not change their belief, and try and get on with my life. But for vaccines in particular, I seethe, because these beliefs have an impact on actually lives and public health. And I have to say I dread them moment when we will finally have a vaccine against SARS-CoV-2, and people will refuse to use it. It’s going to be a tough exercice in emotion management for me.

Anyway, I’ve reached a point now where I try to provide the information I feel is the best for those who want it, and I’m getting better at feeling OK that somebody I value or appreciate believes something I think is plain wrong – without trying to change their mind about it. I’m getting better at identifying the point where a discussion stops being an exchange of ideas in the search of truth or satisfaction of genuine curiosity, and starts being a standoff between two people with firm beliefs, each trying to shove theirs upon the other.

Things I’m Learning [en]

It’s been a long time without writing, amongst other things because of surgery on my right wrist a few months ago. I’m doing good now. And a few pieces of my life puzzle seem to be falling into place.

Here we go, in no particular order (well, maybe a bit).

  • Doing nothing whilst recovering from surgery or illness is not doing nothing, it is recovering – taking care of myself.
  • If a key component to procrastination is anxiety, then reducing my anxiety will help me procrastinate less.
  • Even though my procrastination rarely gets me into very deep trouble, it generates a lot of stress, and I am now more than fed up with spending whole days feeling awful before I actually manage to snap out of it and act.
  • As with many things, the solution is not “understanding” but “doing differently”.
  • Two things I can do to reduce my anxiety around “doing stuff”: create habits and plan ahead.
  • “Self-discipline” doesn’t have to be something we’re capable or not capable of doing. It can be a decision, a choice. “I am going to do this thing today because I decided to do it, to this end.”
  • Creating daily to-do lists with only the things I can guarantee I will do on that given day, rather than what I want to do or feel I should do avoids setting me up for failure and sets a virtuous circle in motion. Even if there is just one thing on my list.
  • Sleeping is something we do to feel good the next day. So going to bed when tired doesn’t have to be “stealing from today”, but “investing in tomorrow”.
  • Me first, then my cats, then other people (family and close friends first).
  • Even if you leave a big mark on the world, you still die and you’re still gone.
  • Fear of death? The ultimate FOMO.

The Importance of Being Active [en]

I’ve already noticed that I fare better when I am active. My mood is better, I’m more easily motivated, I have more energy. Doing things is easier.

Activity brings motivation. I had that key.

But I still remained stuck in non-activity: how and where do I find the will to jumpstart the machine and be active again?

On Monday morning I understood a key point I’d been missing. A shift of focus, actually. It’s funny how so many of the most important realisations in life are shifts of focus. Looking at things differently.

My mission is not to get things done, because X and Y are on my list and need to be done so I reach my goal or stay out of trouble.

My mission is to be active. That is the important thing. Not doing the things. Being active. Process over outcome. And, well, I might as well keep myself active with things I need or want to do.

It may seem minor, but looking at things this way makes a big difference.

“How am I going to keep myself active today?” versus “how many of my to-dos can I cram in today?”

Things I need to do become a means to fulfil my mission of ensuring a certain level of activity in my day. And thus it becomes much easier to do them.

Making Memories [en]

I’ve recently started watching TV series (Doctor Who!) and listening to podcasts again, partly in an attempt to pull myself out of some activities or preoccupations that were on the way to becoming a little obsessive. And amongst those podcasts I listened to recently, one episode seems to have had a lasting impact on how I view the world and life: Hidden Brain’s Yum and Yuck.

It’s funny how you don’t always realise on the moment that a new idea is going to be an important milestone in your worldview. I’ve groaned about this before, concerning podcasts. But in this case, I’m lucky, I did manage to lay my hands on the podcast to show it to you.

So, what’s this about? The episode is about food. But the idea that struck me has to do with how we “make” memories. The podcast was describing how memories of meals are created. For example, if you eat a meal of just one thing, you will remember that one thing. But if you eat the same amount of food, in the form of five different things, you will have memories for those five things. See where this is going?

It seems quite obvious, but it’s not something I had ever given much thought to. So, if I eat three slices of toast for breakfast, and put honey on all three, my memory of breakfast is going to be “honey on toast”. But say I put honey on one toast, jam on the second, and cenovis on the last: my memory of my breakfast will be much richer.

The podcast went on to talk about ordering strategies at the restaurant: do you order your favorite dish, or take the risk of trying something else? If you eat something different each time you go to the restaurant, or your favorite dish each time, you will not have the same memories. There is a tension between immediate enjoyment and the creation of memories.

In the same way, if you spend three weeks of holiday at the beach, you won’t have much to tell. But you will certainly have enjoyed each day (if you like the beach). But if you did all sorts of things during your holiday, there are certainly days where you would have had more pleasure sticking with the beach — but your memories of your holidays will be much richer.

I tend to stick in my comfort zone. I’ll order the same thing again and again. I’ll do the same thing over and over. I stick with what I know and what I like.  I go to the same places. I’ve been in the same flat nearly 20 years, have been doing judo for 25, sailing for 10… I go to India regularly, but don’t really travel around or visit new places.

I had never realised the impact this way of living my life was having on the memories I am building of my life. I sometimes feel adrift in time, in some sort of limbo, and I’m now considering explicitly trying to add more “peak experiences” to my life.

Regarding food, because meal-memory seems to have an impact on whether you feel hungry or not, this insight is also encouraging me to make sure I have less “mono-meals” and more meals with a collection of different foods composing them.

Biais d’attribution: ne jugeons pas autrui aussi sévèrement [fr]

Tous les jours, je me retrouve face à un biais cognitif (chez les autres et moi-même) qui commence à sérieusement me casser les pieds, y compris quand c’est moi qui m’y laisse prendre: le biais d’attribution (voir aussi: l’erreur fondamentale d’attribution).

Si vous googlez ces deux termes vous trouverez tout un tas d’articles pour en savoir plus. De mon côté, je vais tenter d’expliquer simplement où je vois ce biais se manifester, et pourquoi je le trouve aussi casse-bonbons.

Si je devais trivialiser ce biais pour l’expliquer, c’est un peu l’erreur de pensée qui consiste à considérer que l’autre est soit un maladroit soit un connard, tandis que nous, nous avons toujours de bonnes raisons pour faire ce qu’on fait.

Quelques exemples:

  • la personne qui coupe la file d’attente, clairement c’est un connard (alors que peut-être qu’il y avait une très bonne raison à son comportement, indépendante de sa valeur propre en tant que personne); les rares fois où c’est nous qui nous retrouvons à couper la file, on a toujours conscience du caractère exceptionnel de cette action et du fait qu’on a une vraie bonne raison pour le faire
  • je suis cycliste et automobiliste: quand je suis à vélo, je peste contre ces abrutis d’automobilistes qui ne tiennent pas compte des vélos; quand je suis en voiture, je peste contre ces abrutis de cyclistes qui ne respectent rien. Alors que quand c’est moi qui tiens le volant ou le guidon, je ne suis pas une abrutie, j’optimiste ma conduite, ou peut-être, je n’ai pas vu l’autre parce qu’il était dans mon angle mort, ou encore, j’ai pris un raccourci car j’étais en retard
  • la personne que j’interpelle ne me répond pas: c’est certainement un malappris, ou une autre variété de connard — alors qu’en fait la personne est sourde ou malentendante et ne m’a simplement pas entendue
  • dans une expérience, on donne à un participant la télécommande d’un train électrique qu’il doit conduire; un autre participant doit observer et évaluer le conducteur. Sans que les participants le sachent, les expérimentateurs font varier la vitesse et la puissance du train. La personne qui tente de le conduire se rend bien compte qu’il y a des facteurs en-dehors de son contrôle qui lui rendent la tâche difficile, tandis que l’observateur, lui, va juste voir que l’autre est un mauvais conducteur, un maladroit incompétent

Vous voyez le schéma? On est prompts à juger les autres pour leur comportement, alors que notre comportement a toujours une explication rationnelle et valable.

L’explication via cette “erreur fondamentale d’attribution” est la suivante: on considère que les raisons qui poussent l’autre à agir sont “intérieures”, sans tenir compte des circonstances extérieures, qui ont pourtant une bien plus grande influence sur nos actions. On s’en rend bien compte quand il s’agit de nous: on est en retard, on ne peut pas faire autrement, quelque chose est venu nous mettre des bâtons dans les roues – mais on l’oublie promptement lorsqu’il s’agit d’expliquer les actions d’autrui.

C’est pour ça qu’un de mes mantras personnels (et que je demande également aux membres du groupe Diabète Félin d’appliquer les uns envers les autres) est “accorder à l’autre le bénéfice du doute”. Il s’agit d’activement combattre ce réflexe de la pensée qui étiquette de façon jugeante l’autre parce qu’il a fait ceci ou cela. Il s’agit de se souvenir que de son point de vue, ses intentions sont certainement bonnes, et qu’il y a aussi certainement des facteurs extérieurs à son contrôle qui motivent son action.

(Laissons de côté pour le moment la question des – rares – personnes véritablement malfaisantes. Leur existence n’est pas une raison pour soupçonner l’humanité tout entière.)

Je trouve que dans l’ensemble, surtout avec la course à l’indignation que sont devenus les médias sociaux aujourd’hui, on est beaucoup trop prompts à juger notre prochain et à lui attribuer des intentions négatives, et qu’un peu de générosité de générosité vis-à-vis de ce qui motive autrui, ça ne fera de mal à personne.