Facebook: le règne du semi-public [fr]

[en] I write a weekly column for Les Quotidiennes, which I republish here on CTTS for safekeeping.

Chroniques du monde connecté: cet article a été initialement publié dans Les Quotidiennes (voir l’original).

En décembre, Facebook a mis en place de nouveaux réglages de confidentialité pour ses utilisateurs. J’ai passé la journée à lire, tester, et enquêter sur la question en préparation d’un atelier que je donne la semaine prochaine et ai compilé une petite liste des principales conséquences de ce changement pour ceux d’entre vous que ça intéresse. Je vous laisse par contre aller lire tous seuls comme des grands “Peut-on encore parler de vie privée sur Facebook?” chez ReadWriteWeb France si vous voulez des détails, parce que ce qui m’intéresse aujourd’hui c’est une problématique plus large:

  • le “véritablement privé” n’existe pas en ligne (on pourrait même aller jusqu’à dire qu’il n’existe pas dans les espaces numériques)
  • de plus en plus, on voit tous un internet différent.

En bousculant nos réglages dans le sens du “moins privé”, Facebook a au moins le mérite de nous encourager à nous arrêter pour nous poser des questions. Qui précisément peut voir ce que je mets sur mon profil, ou ailleurs sur internet, pendant qu’on y est? Si j’écris un message sur le mur de quelqu’un d’autre… Est-ce que je me rends compte que selon les réglages du propriétaire du mur, mon gribouillis est potentiellement visible au monde entier? Et si mes photos de soirée sont accessibles aux amis de mes amis… ça fait vite beaucoup de monde.

Toutes ces questions sont souvent bien floues pour le public non spécialiste, même si la plupart des informations publiées sur Facebook sont au pire embarrassantes si elles tombent entre les mauvaises mains. Par contre, il faut à mon avis prendre au sérieux ce manque de conscience du caractère semi-public de nos expressions numériques, ne serait-ce que parce que celles-ci peuvent être copiées, multipliées, et diffusées à l’infini en quelques clics de souris. Internet bouscule nos catégories “public” et “privé”, et il est normal qu’on ne sache pas intuitivement comment s’y comporter sans dérapages.

Tirer des boulets rouges sur Facebook n’est pas non plus la solution (même s’il faut protester quand un service qu’on utilise nous fait des entourloupes du genre, clairement) puisque de plus en plus, nous faisons l’expérience du web et d’internet à travers des comptes utilisateurs qui en personnalisent le contenu. Un exemple? Les résultats d’une recherche Google, désormais, sont personnalisés pour chaque utilisateur. Eh oui: les résultats que vous voyez ne sont plus forcément ceux de votre voisin (lire cet excellent topo sur la question si la langue de Shakespeare ne vous rebute pas).

Comprendre qu’on voit tous un web différent, que les règles régissant qui voit quoi sont complexes et nous permettent ainsi difficilement de prédire ce que voit l’autre, que le privé comporte toujours une certaine part de public (et peut le devenir brutalement): des compétences indispensables pour appréhender la culture numérique à laquelle il est de plus en plus difficile d’échapper, à moins de se résoudre à vivre tout seul sous un très très gros caillou.

Sur ce, je vous laisse filer faire le ménage dans vos paramètres de confidentialité Facebook, histoire de démarrer l’année 2010 d’un bon pied!

A Quick Thought on Being Public [en]

[fr] Dans un monde où l'on est des personnages de plus en plus publics, s'adressant simultanément à des publics jadis séparés, on peut pour moi soit se réfugier dans la langue de bois pour ne heurter personne, soit se mettre les gens à dos en leur disant en face des choses qu'on aurait auparavant évité qu'ils entendent, soir jouer de l'équilibrisme en privilégiant l'honnêté exprimée d'une manière qui prend soin des sentiments des autres.

In these days of increasingly overlapping publics, I see three ways in which to deal with the fact that we are all becoming — to some extent — public figures, our multiple faces forced to come together as the publics they’re meant for also do:

  • go all tongue-tied and diplomatic, and dumb down your discourse so nobody can take offence or hear something they shouldn’t;
  • be an asshole, by saying things to people’s faces that one normally would keep for behind their backs;
  • walk the fine line of honesty and respect whilst expressing things in a way that cares for others’ feelings.

The third way, clearly, is the most challenging, but probably also the most rewarding from the point of view of personal growth.

Bad With Faces, Good With Names [en]

[fr] Je suis très peu physionomiste mais dès qu'on me donne un nom, je sais exactement qui vous êtes. Pensez-y la prochaine fois qu'on se croise en vitesse quelque part, à une conférence par exemple!

I have a problem. I am really bad at recognizing faces. Really very bad. Bordering on hopeless.

This makes social occasions like conferences very difficult for me, because people keep coming up to me, saying hello, and though their face might seem familiar, I have not the slightest idea who they are.

Even with people I know, it’s sometimes difficult. My good friend Kevin Marks came up to me to say hi this morning, and it took me 4 excruciatingly long seconds to recognize him.

One might think that it’s because I meet too many people, or have too many people in my network, and can’t keep up. I’m happy to say it isn’t the case — I haven’t reached such a celeb status, luckily.

How do I know that?

I know that because the moment the person who just walked up to me gives me their name, I know exactly who they are.

I am deadly good with names.

That’s why I like conference badges.

The way I explain this to myself is that my “internal database” of people I know has an index on the name column, and not the face one. It’s as if I were “colour-blind to faces”.

I’m really good at remembering people, actually. I just need names.

Problèmes d'internet, problèmes d'humains [fr]

[en] I write a weekly column for Les Quotidiennes, which I republish here on CTTS for safekeeping.

Chroniques du monde connecté: cet article a été initialement publié dans Les Quotidiennes (voir l’original).

Les médias se plaisent à nous rappeler régulièrement qu’internet est un espace dangereux. Passons pour cette fois, si vous le voulez bien, sur les exagérations et les dangers particuliers (je le fais déjà assez ailleurs) pour nous pencher sur un principe de base.

Internet est peuplé d’humains. Les problèmes que l’on y rencontre sont donc avant tout des problèmes d’humains. Et dans les médias sociaux en particulier, les principales difficultés sont de l’ordre du relationnel.

Les personnes peu familières avec internet semblent tout d’un coup perdre toutes leurs compétences interpersonnelles dès que l’échange a lieu par écrans interposés. Un commentaire désagréable en réponse à un article? Il suffit souvent de se demander comment l’on réagirait en face-à-face. Certes, cela demande parfois un peu de maturité — mais il est très rare que l’on se retrouve compètement démuni face à quelqu’un dans la plupart des situations de la vie courante.

Même les problèmes plus “sérieux” comme le harcèlement en ligne, les contacts sexuels entre adultes et mineurs, les communautés “malsaines” (pro-ana, racisme…) sont à la base des problèmes de personnes. Ce sont des problèmes qui existent en-dehors d’internet, qui se manifestent là où il y a des gens — y compris sur internet.

On comprendra donc qu’y remédier passera donc par se concentrer sur la dimension humaine du problème, et non sur celle, accessoire, de sa présence sur internet.

Je simplifie, bien sûr, et il y a des exceptions. Tout ce qui a trait au droit d’auteur, par exemple, est inextricablement lié aux caractéristiques techniques d’internet. La permanence des objets numériques, également, change le paysage de nos relations les uns aux autres, et à l’information.

N’oublions donc pas, dans notre exploration du monde connecté, que les principales difficultés que nous y rencontrerons seront humaines. Et que les humains, c’est du terrain connu.

Chroniques du monde connecté pour Les Quotidiennes [fr]

[en] I'm now writing a column for Les Quotidiennes, a local online publication. The first one is up: E-mail, quand tu nous tiens.

Ça y est! Ma première chronique pour Les Quotidiennes, intitulée “E-mail, quand tu nous tiens“, est en ligne. J’y écrirai désormais chaque semaine les “Chroniques du monde connecté“, un coup d’œil humaniste dans l’univers technophile des gens ultra-connectés (nous!!)

E-mail, quand tu nous tiens | Les Quotidiennes C’est un peu plus “grand public” que ce blog — et j’avoue que j’ai quand même pas mal réfléchi au sens que ça pouvait avoir d’écrire ailleurs qu’ici: eh bien, simplement, toucher un autre public, dans un autre contexte. On verra ce que ça va donner, en tous cas j’ai plein d’idées pour les semaines à venir et je me réjouis beaucoup!

Et une fois que vous avez fini de lire mon article, filez vous délecter de ceux de mes co-chroniqueurs!

Social Media Survival Kit [en]

[fr] Deux règles très simples pour survivre à l'ère des médias sociaux.

  1. You do not have to read everything.
  2. If you feel bad about missing stuff, apply rule one. This goes for e-mails, too.

My Web World Has Grown [en]

The day before yesterday, a tweet of mine prompted me to get into blog gear again (honestly, why do I need other people? seems I have enough inner dialog going on).

The idea, as expressed in my tweet, was half-baked. I was actually thinking back to when I started blogging, or even when I became a freelance “something-or-other” 2.0 consultant. There are more people around today. The pond is bigger. This is a normal phenomenon when it comes to adoption: if you’re an early adopter, a cutting-edger, well, sooner or later those technologies or subcultures which were the turf of a happy few you were part of become more and more mainstream.

I’m seeing that. It’s been going on for some time. There are people all over doing tons of interesting stuff and I can’t keep up with them (I don’t even try). And here, I’m not even talking about all the wannabe social media experts.

So yes, the pond has turned into a lake, and I find myself a smaller fish than I used to be. Though I sometimes look back with a bit of nostalgia upon the “golden days” of blogging or Twitter, it suits me quite well. I actually never tried to be a big fish: one day, I suddenly realised that it was how people saw me. So I went with it, quite happily I have to say.

But it’s nice to slow down. I’ve never really been in the “breaking news” business, and have no desire to. I feel I’ve retreated somewhat from the over-competitive fringe of my web world, and my life is better as a result. Business too, if I look at my calendar for the upcoming months.

There are times when I regret that my “poly-expert” profile does not allow me to stay as up-to-date with everything as I’d sometimes want to. I haven’t given a talk in a school in nearly a year, and I miss it. I’ve played with Google Wave, but haven’t taken three days to dive into it completely as I would have done five years ago. (One of the reasons, here, is that I simply can’t afford to spend three days diving into something, like I could when I was an employee. The irony is not lost on me.)

All in all, there are more people now in my web world, and in the web world in general. It’s a good thing for the world. It has changed my place somewhat, but overall I’m pretty happy with it.

I don’t feel I’ve shrunk to tadpole status yet, though! 😉

Fréquence Banane: Internet rend-il stupide? [fr]

[en] On the radio tonight -- and tomorrow night. In French.

Ce soir, de 20 à 21h, je serai l’une des invités de l’émission “La langue de bois” de la radio universitaire Fréquence Banane. Le thème: Internet rend-il bête? 🙂

Grande question pour un débat qui, j’imagine, sera animé (sauf si nous sommes tous d’accord avec moi!), avec Lyonel Kaufmann et Olivier Glassey.

Donc, ce soir, branchez-vous sur 94.55 si vous êtes dans le coin, et sinon, écoutez l’émission en streaming sur le site de Fréquence Banane!

(Je serai à nouveau sur les ondes demain, mais sur Couleur3, pour y parler de l’eclau lors de l’émission Saperlipopette, à 17h30 si ma mémoire ne me fait pas défaut.)

Donner 80%, ou la loi de Paréto appliquée aux métiers des idées [fr]

On est tous familiers avec la loi de Pareto: 20% d’effort pour 80% de l’effet, etc.

L’an dernier, à SoloCamp, Dennis Howlett nous en a proposé une application en réponse à la question (qui torturait plusieurs d’entre nous): sachant que donner gratuitement est une forme de marketing très efficace, surtout dans les métiers des social medias, où mettre la limite? Combien donner? Quand commencer à faire payer? Comment ne pas se faire avoir, sans pour autant devenir radins?

Eh bien, sa réponse m’a stupéfaite, j’avoue, et bien tranquillisée. D’après lui, quand on est dans les métiers de la “propriété intellectuelle” (en gros, ce qu’on offre à nos clients, ce sont principalement des idées), une bonne ligne de conduite est de considérer qu’on va donner gratuitement (ou presque) 80% et faire payer (cher) les 20% restants.

Donner 80%!

Je suis presque tombée de ma chaise.

Puis, sachant que Dennis est quelqu’un qui réussit plutôt bien en affaires, que j’avais depuis un moment le sentiment désagréable que je donnais de moins en moins et que mon business en pâtissait, je me suis un peu détendue, et j’ai décidé de garder en tête ce principe.

Et si j’y réfléchis et que je fais un peu l’inventaire de mon “travail gratuit”, je me rends compte qu’on y est assez vite:

– tout ce que je publie sur ce blog et ailleurs sur internet
– les Bloggy Fridays
– l’eclau
– les repas, pots, “petites discussions” où je fais du “consulting gratuit” en échange d’une pizza ou de la reconnaissance éternelle de mon interlocuteur
– organiser Going Solo et SoloCamp (c’était pas censé, mais ça a fini par l’être, du travail “gratuit”)
– les personnes que je dépanne à l’oeil, en ligne et hors ligne
– les interviews accordés aux journalistes, participations non rémunérées à tables rondes et autres événements…

Je pourrais continuer encore la liste.

Bien entendu, il y a un retour sur investissement, là. C’est mon budget marketing, si on veut, toute l’énergie que je mets dans ces diverses activités. C’est “ce qui me fait”, aussi, et j’en suis bien consciente. Mais rien de tout ça ne remplit directement le compte en banque: ça fait partie des 80% grosso modo de mon temps-énergie que je ne facture à personne, et durant lequel je “travaille gratuitement”, suivant quelle définition on donne à “travailler” et “gratuitement”.

Me voici donc à répondre enfin à M. Fontana d’Universal, mon interlocuteur contradictoire lors du “débat” sur le piratage à la RSR1 il y a quelques mois, lorsqu’il demandait (ironiquement et sûr de sa réponse) si j’avais l’habitude de travailler à 100% et de n’être payée qu’à 50%. (L’homme de paille favori de mes détracteurs concernant les questions de partage de fichiers semble être que je ne veux pas que les artistes soient payés pour leur travail…)

Oui, oui, Monsieur — et même plus que ce que vous imaginez. C’est comme ça que ça fonctionne, dans mon métier.

Vous me voyez venir: si l’on accepte de sortir d’une mentalité d’employés (ou pire, de rentiers), on pourrait sans beaucoup de difficulté appliquer ce genre de raisonnement au monde des oeuvres de l’esprit en général, y compris la musique. Pour les détails, il faudra repasser, car je ne les ai pas (j’en entends déjà qui hurlent) — mais n’y a-t-il pas là quelque chose à creuser?

Google Identity Dilemma [en]

[fr] Depuis des années, j'utilise une identité "fantaisiste" pour tous mes services Google. C'est mon identité principale (vous voyez de laquelle je parle si on est en contact). J'aimerais passer à prénom.nom comme identité principale (je la possède aussi) mais tous les services Google sont rattachés à la première, et je ne vois pas vraiment comment m'en sortir. Idées bienvenues!

When I created a Gmail address all these years ago, I chose a “funny-cute” name that was easy to remember for most of the people I knew. I was on IRC all day back then, and my nickname was bunny(wabbit_), and people knew I was Swiss.

I didn’t really think my Gmail address would become so central to my online identity, you see.

Of course, I also registered firstname.lastname and redirected it onto my main e-mail address and identity.

As years went by, Google added all sorts of services that got tied onto this identity (not to mention the 2.5Gb of archived e-mails and chats). Google Talk, Google Profiles, and recently, Google Sidewiki and Google Wave.

These last weeks, I’ve been wondering if I shouldn’t “make the switch” and use my more serious “firstname.lastname” e-mail address as my main identity. Actually, to be honest, I’d like to. But there are obstacles — oh, so many.

First, all my contacts are linked to my current account. All my e-mail is stuck in it. My Feedburner and Google Reader settings are linked to it. My blogger blog is. My calendar. Everywhere I use my Google identity for a third-party service, here we go.

And Google does not allow you to link one Google account to another (sure, you can redirect mail, but that doesn’t solve anything).

So, do you see my problem? If you have any bright ideas, I’m listening. I would really like a solution.