Depuis quelques semaines j’ai un rendez-vous hebdomadaire avec ma “binôme planning”. Une copine, TDAH bien aligné sur le mien (ou le mien sur le sien), aussi tendance à la surcharge d’agenda qui fait finir sur les rotules. Une affaire qui roule (pas sur les rotules).
On parle évidemment de problématiques TDAH en marge de l’agenda, et ce soir on parlait rangement de l’appart et nourriture. Quelques réflexions intéressantes que je veux partager avec vous (et non “vous partager“).
Le point de départ, c’est: “comment on échoue”? Dans mon travail, dans le domaine de la maintenance et des ingénieurs et des machines, on parle de “failure modes”. C’est pas la même chose si ma voiture est en panne parce qu’une pièce a cassé dans le moteur, parce que j’ai oublié de mettre de l’essence, parce qu’une fouine a grignoté un câble, parce que les bougies sont encrassées ou parce que le moteur a serré. En gros, dire “ça ne marche pas”, c’est joli, mais c’est mieux de pouvoir décrire “de quelle façon ça ne marche pas”, et même “comment la panne est-elle provoquée”.
Donc: qu’est-ce qui fait que ma cuisine est en bordel et que la vaisselle s’empile? Qu’est-ce qui fait que j’ai raté mon rendez-vous? Qu’est-ce qui fait que j’ai soupé à minuit? Qu’est-ce qui fait que je suis en panne de seringues pour mon chat diabétique?
Evidemment, la réponse à ces questions est de l’ordre du concret, pas du jugement moral (genre “chuis nulle”). Dans mon cas par example, j’avais fait le constat il y a bien des années que la façon dont ma cuisine devenait un espace de chaos déprimant, ça commençait avec le fait que je ne sortais pas la poubelle quand elle était pleine. Les emballages restaient sur le plan de travail ou le bord de l’évier, du coup c’était pas rangé, du coup c’était plus facile de lâcher sur la vaisselle, et hop, la spirale infernale. Ce constat m’avait fait prendre la mesure de l’importance de changer la poubelle lorsqu’elle était pleine, pour éviter de déclencher la suite de conséquences négatives.
Une fois la poubelle sous contrôle, j’ai fait un deuxième constat. Pourquoi la vaisselle s’empile-t-elle dans l’évier? Parce que l’égouttoir est encombré de vaisselle propre pas rangée. Et pourquoi n’est-elle pas rangée? Parce que la méthode de rangement dans les armoires n’est pas ergonomique, et ne “facilite” pas assez le rangement. Cela augmente l’effort nécessaire pour ranger et diminue donc les chances que ça se fasse.
Donc, tout comme changer la poubelle avant qu’elle déborde, réorganiser le rangement des couverts et services et différents ustensiles culinaires peut contribuer à faire en sorte que la vaisselle se fasse à mesure.
Un autre élément qui a émergé de cet échange: plus on est fatigué·e quand on finit de souper, moins il y a de chances qu’on fasse la vaisselle dans la foulée. On voit donc que “manger trop tard” peut donc, par un enchaînement d’effets, mener à une cuisine en bordel.
Ça me rappelle une discussion avec une autre amie, hier: elle n’aime pas faire la vaisselle après souper. Honnêtement, je comprends. Une fois le ventre plein, la journée finie, j’ai juste envie de chiller. Dans son cas, elle a une bonne solution: le matin, pendant que son café cuit, elle a une fenêtre de temps parfaite pour faire la vaisselle, au lieu d’attendre bêtement. Mais dans le mien, et celui de ma binôme, soit il n’y a pas de café, soit il faut simplement se rendre à l’évidence que le matin, il ne faut rien nous demander. Et de mon côté, arriver le matin dans une cuisine plus ou moins rangée dont l’évier est vide ou presque donne un bien meilleur coup d’envoi à ma journée que si je suis confrontée directement à une tâche qui m’ennuie au plus haut point et pour laquelle il me faut pas mal d’énergie.
La vaisselle, le souper… la nourriture. Le problème du repas du soir, c’est qu’on arrive à sa porte lessivée par la journée. Plus de jus, plus de methylphénidate (souvent), la batterie attentionnelle à plat. Amplement de quoi procrastiner le repas, et faire le lit de l’évier plein de vaisselle (et de la cuisine qui se fait la malle avec notre moral). Comment remédier à ça?
Planifier les menus à l’avance… c’est joli en théorie, mais pour moi en tous cas, utopique. Je suis quelqu’un qui marche aux réserves et à l’improvisation. Ce qu’on peut faire par contre, c’est réduire l’effort nécessaire à la prise de décision et à la préparation du repas. Par exemple, avoir une collection de “repas d’urgence” plus ou moins équilibrés qu’on peut faire rapidement et sans effort, sans trop de vaisselle, sur la base d’ingrédients “stock” qu’on s’assurera de toujours avoir à la maison. Et les mettre par écrit (post-its, cartes) c’est encore mieux, parce que quand le cerveau est au bout, des fois même faire 1+1+1= repas c’est trop. Quelques idées:
- une demi-boîte de conserve de haricots rouges (ou pois chiches) + une petite boîte de maïs + un bout de concombre/tomate et une boîte de thon ou deux oeufs durs (sauce salade toute prête of course)
- pâtes au pesto avec fromage râpé stocké au congél pour qu’il ne devienne pas bleu, une demi-concombre en dés avec la sauce à salade, pour accompagner un morceau de viande ou de poisson (le poisson se fait super bien au micro-ondes si jamais)
- dans les périodes chargées, acheter de la salade en sachet pour ne pas avoir à laver sa pommée feuille par feuille et l’essorer (surtout si l’évier n’est pas inoccupé)
- une pomme de terre coupée en dés, dans une assiette avec un peu de sel et une ou deux cuillères d’eau, 4-5 minutes au micro-ondes. Une courgette en dés, idem, 2 min au micro-ondes. Une escalope panée de Quorn (perso j’aime celles au poivre et citron) dans le air fryer: hop, c’est prêt en moins de 10 minutes et quasi sans vaisselle
Voilà l’idée – à adapter selon ses habitudes alimentaires et son goût. Le tout est de prendre un peu de temps en amont (pas quand on crève de faim à 22h30) pour identifier ces menus de secours, faire la liste du matériel de base à compléter chaque fois qu’on fait les courses, et les noter quelque part.
Qui eût cru qu’avoir chez soi un petit stock de produits de base bien choisis (oeufs durs, concombre, tomates, maïs et haricots rouges en boîte, thon, pâtes, bocal de pesto, parmesan au congél, courgette, patates, etc) pouvait résulter en une cuisine mieux rangée?






