Arrêtons de parler d'amitiés virtuelles [fr]

[en] I write a weekly column for Les Quotidiennes, which I republish here on CTTS for safekeeping.

Chroniques du monde connecté: cet article a été initialement publié dans Les Quotidiennes (voir l’original).

Une chose qui m’irrite profondément, c’est l’utilisation de l’adjectif “virtuel” pour qualifier tout ce qui se passe en ligne. Réseaux virtuels, mondes virtuels, et surtout, “relations virtuelles”.

J’ai une bonne amie qui habite en France. On se connaît depuis des années, et avec le temps, on est devenues plus proches. On discute presque tous les jours — des fois c’est “tu vas bien, oui, et toi?” et d’autres fois ce sont des conversations plus longues sur le travail, la vie, la famille, nos intérêts.

Nous ne nous sommes encore jamais rencontrées — ni même parlé au téléphone. Mais qu’on n’aille pas me dire (ni à elle) que notre amitié est “virtuelle”.

Le problème avec le mot “virtuel”, vous voyez, c’est qu’il signifie quelque chose comme “seulement en puissance et sans effet actuel”. Dire que cette amitié est “sans effet actuel” parce qu’on ne s’est jamais rencontrées, c’est complètement à côté de la plaque. Il suffit pour s’en rendre compte de voir le joli arrangement floral qui égaye mon salon depuis la semaine dernière. Elle me l’a fait livrer pour me remercier de mes conseils lors de ses débuts comme indépendante. Si c’est pas un effet actuel, ça, je ne sais pas ce que c’est.

Bien sûr, il ne me viendrait pas à l’idée de dire que les communications par chat, SMS, ou même téléphone ont la même valeur que se retrouver en face-à-face autour d’un café. Mais elles en ont une. Et il y a des choses qu’on l’on peut dire par chat ou SMS bien plus facilement que par téléphone ou en personne. Il n’y a donc pas à mon sens de hiérarchie rigide et absolue entre ces différents modes de communication. Ils sont différents, et permettent (ou pas) des choses différentes.

Ces interactions en ligne ne valent pas rien, comme le suggérerait le qualificatif “virtuel”. Il y a de belles amitiés, et même des histoires d’amour, qui se bâtissent sur elles.

Privilégions donc des expressions qui ne charrient pas des wagons de jugements de valeur. “En ligne”, c’est certes moins accrocheur que “virtuel”, mais c’est plus honnête.

Second Life: c'est quoi? [fr]

[en] A brief explanation of what Second Life is. It's a graphical world you access to by signing up on the website and downloading a programme to your computer. In that world, you are represented by an "avatar" (you can see mine from the back at the bottom of the picture, in the middle).

You can interact with other people there by chatting, and you can also interact with objects in the world, or even create things. Everything you see in the photograph was created by people like me (only they have a bit more experience, obviously!)

There is money in Second Life you can use to buy and sell things. If you make things people want, like clothes, you can actually make money inside Second Life and convert it into real (First Life) currency. Second Life is free to use, though you'll need a paying account if you want to do fancy things like own land.

The difference between Second Life and online multiplayer games is that there is no goal or meaning to it other than what we put into it. You can go into Second Life because you like chatting in a graphical environment, or because you enjoy being a digital hairdresser/stylist/architect/whatever. You can organise conferences or even musical events. Basically, anything is possible.

03.12.2006: Lecteurs du Matin Dimanche, par ici!

Second Life est un monde virtuel. On y accède en ouvrant un compte (comme pour la plupart des services en ligne) et en installant un programme sur son ordinateur. Un monde virtuel, ça peut ressembler à ça:

Very confusing

Là, vous me voyez en bas au milieu de l’image, de dos. Il y a deux ou trois autres personnages dans l’image, et au fond, une série de magasins. On est représenté dans le monde virtuel par son avatar — un personnage du monde virtuel que l’on peut contrôler et façonner à sa guise.

A l’intérieur de Second Life, on peut se déplacer, chatter avec les gens que l’on rencontre, agir sur les objets du monde que l’on rencontre, et même fabriquer toutes sortes de choses. Tout ce que vous voyez dans la photo du haut a été construit par les “résidents” de Second Life (des gens comme moi, mais qui maîtrisent un peu mieux). Quand on se déplace, le champ visuel (la “caméra”) se déplace aussi automatiquement.

Si on veut, Second Life est comme un grand chatroom, mais avec un environnement graphique. Du coup, on ne va pas se contenter d’intéragir avec les personnes présentes, mais aussi avec le monde lui-même.

L’interface graphique fait penser aux jeux de rôle en réseau multi-utilisateurs comme World of Warcraft. La grande différence entre un tel jeu et Second Life est que dans Second Life, il n’y a pas de “but du jeu”: comme dans la vie réelle (First Life), c’est nous qui produisons les buts et le sens.

Second Life est gratuit. Si on veut posséder du terrain, par contre, il faut un compte payant. A l’intérieur de Second Life, il y a de l’argent. On en reçoit un peu au départ, et on peut l’utiliser pour acheter des choses. Comme dans Second Life n’importe qui peut créer des objets, on peut aussi s’improviser artisan ou artiste digital et vendre ses productions à d’autres. On peut même y gagner sa vie — en fait, toute une économie parallèle est en marche dans ce monde, et comme il y a un taux de change entre la monnaie “virtuelle” de Second Life et de vrais dollars, elle peut avoir une incidence sur la nôtre.