Les chemins de traverse [fr]

[en] A rather convoluted article to explain why doing stuff that doesn't seem to "fit" with professional objectives (hanging out on IRC, sharing silly photos on Instagram, blogging, being friendly with people) is actually a worthwhile use of your time, making your network larger and bringing opportunities you may not even have thought about.

Dans le milieu de l’entrepreneuriat, du management, le milieu professionnel tout simplement, on parle beaucoup d’objectifs. Il faut en avoir, il ne faut pas avancer à l’aveugle, si ça ne nous rapproche pas de notre objectif, il ne faut pas le faire, etc. (Même dans l’enseignement: tout notre système éducatif fonctionne à coups d’objectifs, avec des effets pervers sur lesquels je m’étalerai peut-être une autre fois.)

Bien fixer ses objectifs, c’est d’ailleurs le sujet du prochain workshop des espaces coworking romands, et je me réjouis d’en apprendre plus à ce sujet. Parce que les objectifs, ce n’est pas ma plus grande force. Et malgré ce que je vous raconte ici, je suis convaincue que les utiliser à bon escient est une compétence précieuse.

La Tourche 2014-08-12 11h21-2.rw2

Mais si je regarde mon parcours professionnel, ma devise est nettement plus “aller là où les envies/circonstances me mènent” que “travailler dur pour atteindre mes objectifs”. Il y a tout un continuum entre les deux, mais je me situe clairement du côté du premier pôle. J’ai déjà “médité” là-dessus dans mon article sur le CréAtelier que j’avais donné il y a quelques années au Swiss Creative Centre: il m’est difficile de donner des instructions pour “faire comme moi”, parce que je n’en ai pas suivies, justement.

Mes succès professionnels sont donc rarement venus parce que je les avais choisis en amont comme objectifs. Ce sont des occasions qui se présentées, des choses que j’ai faites de façon complètement désintéressées et qui, avec le recul, se sont avérées avoir joué un rôle clé. Beaucoup de surprises, en quelque sorte. Difficile de me proposer comme modèle à suivre.

Faut-il donc que je me résolve à dire: “passez votre chemin, rien à apprendre de mes 15 ans sur le terrain”? “J’ai réussi à me mettre à mon compte, je trouve des clients et des mandats, j’ai une certaine notoriété en ligne, mais je ne peux pas vous faire profiter de mon expérience”? Je pense que ce serait autant une erreur que de dire “l’entrepreneuriat, soit on a ça dans le sang, soit on ne l’a pas”.

Je pense que s’il y a un enseignement qu’on peut tirer de mon parcours, c’est qu’il ne faut pas négliger les chemins de traverse, les digressions, les projets qui ne semblent peut-être pas aller dans le sens de ce qu’on cherche à faire. Et je me rends compte que ce conseil va complètement à l’encontre de l’approche “j’ai un objectif et je me focalise dessus”, considérée généralement comme “la façon juste de faire les choses”. Mais je ne crois pas qu’il faille abandonner une approche une pour l’autre, mais plutôt savoir jouer des deux dans un esprit de complémentarité.

Un mot sur la complémentarité, donc, avant de revenir à ces chemins de traverse et à leur importance. J’écoutais ce week-end un intéressant épisode de podcast sur la beauté, la nature, les mathématiques. A un moment de l’interview, l’invité (un physicien) parle du principe de complémentarité. Il donne comme exemple la dualité onde-corpuscule: il y a des moments où c’est utile de regarder une particule subatomique comme une onde, et d’autres où c’est plus utile de la regarder comme un corpuscule. Elle est les deux, mais nous n’arrivons pas à la voir comme les deux en même temps.

Je trouve qu’il y a là une parenté avec d’autres principes de la vie, qu’on oppose souvent, mais qu’il vaut mieux considérer comme complémentaires:

  • se laisser porter par la vie, et mener sa vie en suivant des objectifs ou chemins spécifiques
  • s’accepter comme on est, et chercher à grandir en tant que personne
  • saisir les opportunités qui se présentent, et créer les opportunités dont on a besoin
  • se concentrer, et réfléchir de façon créative (cf. l’influence que l’architecture peut avoir là-dessus, en passant)…

Les objectifs, ça focalise. C’est une sorte de motivation extrinsèque. On se concentre sur ce qui amène directement à la récompense, à l’objectif. Il y a des situations où c’est utile, mais d’autres où c’est dommageable, lorsque le chemin entre les actions qui mènent à un résultat et ce résultat n’est pas direct ou évident.

Un exemple, pour moi, ce sont les relations humaines. Je n’ai pas l’impression qu’avoir des “objectifs” soit très fructueux pour construire une relation. Dans une relation, il faut être à l’écoute, s’adapter, demander, réagir, donner… C’est mouvant.

Et si je reviens à mon parcours fait de chemins de traverse, les relations humaines sont un ingrédient capital sur lequel s’est construite mon indépendance professionnelle.

Et… les relations humaines sont aussi un ingrédient capital dans l’utilisation des médias sociaux. Ils ne s’appellent pas “sociaux” pour rien. Une grande partie des organisations qu’on peut observer autour de nous échouent à s’engager dans le plein potentiel des médias sociaux justement parce que ce volet “humain” est négligé.

Concrètement, que signifie s’engager dans ces chemins de traverse? Et comment est-ce que ça peut nous être bénéfique?

Pour commencer, voici trois axes qui pour moi définissent l’état d’esprit des “chemins de traverse”:

  • mettre de l’énergie dans les relations pour elles-mêmes, parce qu’on aime les gens, ou parce qu’elles nous enrichissent
  • être généreux (de son temps, de son savoir, de ses compétences)
  • faire des choses qui nous intéressent, parce qu’on aime les faire, et pas juste les choses qui sont “utiles”.

Il est important de garder en tête qu’il s’agit d’un mode d’être qui n’a pas besoin d’être exclusif et absolu. On peut être généreux et également dire non. On peut choisir de mettre de l’énergie dans une relation car elle nous est utile. On peut renoncer à faire quelque chose qui nous plaît parce qu’on a besoin de temps pour faire sa comptabilité. Complémentarité.

Ensuite, il y a l’application aux médias sociaux — au monde en ligne. S’il est possible de s’en passer, bien entendu, c’est lui notre plus grand atout pour nous rendre visibles, être trouvés, élargir et maintenir son réseau. Il serait dommage de s’en priver.

  • jouer avec les différents outils, les essayer, découvrir nos affinités avec tel ou tel service
  • chercher des personnes ou des sources d’information qui nous intéressent
  • s’engager dans des communautés en ligne
  • et de nouveau, être généreux — de ses commentaires, de ses partages, de ses idées.

Tout ça, j’insiste, en considérant l’entier de nos intérêts, personnels, professionnels. Etre actif dans une communauté “tricot” qui nous passionne a bien plus de chances de nous ouvrir des portes que de s’ennuyer dans une communauté “business” qui devrait nous intéresser mais ne nous fait pas vibrer.

Poursuivre ces chemins de traverse, ces intérêts pas forcément immédiatement en ligne avec nos objectifs professionnels, ça donne une sorte de “coup de sac” à la vie. Ça introduit de la diversité dans notre réseau et nos idées. On sait d’ailleurs que les liens faibles sont une grande sources d’opportunités professionnelles — et quoi de mieux que de varier ses intérêts, les communautés dont on fait partie, les gens qu’on rencontre, pour enrichir cet aspect-là de notre réseau? Quelques exemples (les miens ou ceux d’autrui…):

  • une photo “personnelle” sur instagram qui mène à une proposition pour donner un cours
  • un article populaire sur les chats qui fait découvrir un blog, puis la personne derrière, dont les compétences nous interpellent
  • un ami de la famille qui cherche à engager quelqu’un avec un profil similaire au nôtre, juste quand on termine ses études
  • on sympathise avec un commerçant, qui pense plus tard à nous pour un projet qu’il mijotait
  • des heures à chatter de tout et de rien sur IRC avec des gens, qui, des années plus tard, s’avèrent être des contacts professionnels précieux
  • un espace coworking qui n’est pas très profitable mais qui apporte de la visibilité…

Je le répète une dernière fois: l’état d’esprit des chemins de traverse est complémentaire aux activités intentionnelles de notre vie professionnelle. Ne fréquenter que les chemins de traverse est à mon avis aussi dénué de sens que de les éviter complètement. A chacun de faire son mélange et trouver son point d’équilibre!

Orkut? Qu'est-ce que c'est? [en]

Orkut est associé à  Google — c’est le projet personnel d’un des membres de l’entreprise, qui alloue à  ses employés 20% de leur temps pour travailler sur des projets personnels, afin d’encourager leur créativité — mais qu’est-ce que c’est? A quoi ça sert? Qu’y fait-on? Quelques explications et un mini-guide pour démarrer.

Orkut existe depuis un peu plus d’un mois, si mes informations sont correctes. Orkut est associé à  Google — c’est le projet personnel d’un des membres de l’entreprise, qui alloue à  ses employés 20% de leur temps pour travailler sur des projets personnels, afin d’encourager leur créativité — mais qu’est-ce que c’est? A quoi ça sert? Qu’y fait-on? Quelques explications et un mini-guide pour démarrer.

Le but principal d’un site comme Orkut est de référencer qui connaît qui (qui est “ami” de qui). Concrètement, lorsque l’on entre dans la communauté, on indique qui sont les personnes de la communauté que l’on connaît déjà , et on invite ses amis “externes” à  rejoindre la communauté. Chaque membre peut ensuite fournir des informations dans son profil (autant ou aussi peu qu’il le désire).

On ne peut entrer dans la communauté que sur invitation. Autrement dit, il faut connaître quelqu’un qui est déjà  inscrit pour pouvoir y rentrer. Cela assure une certaine cohésion au réseau qui est en train de se construire.

La combinaison du réseau relationnel et des informations personnelles données dans les profils permet d’entrer assez facilement en contact avec les “amis des amis” avec lesquels on a des intérêts communs. On découvre également parfois des points communs que l’on ignorait avec des “amis” un peu distants!

La première chose à  faire lorsque l’on s’inscrit (après avoir reçu l’invitation nécessaire), c’est ajouter quelques informations dans son profil. Inutile de vouloir le remplir de façon exhaustive du premier coup — il vaut mieux répondre rapidement aux questions de base, et revenir par la suite compléter petit à  petit les parties plus “intéressantes” de son profil, au fur et à  mesure qu’on en sent l’inclination.

Ensuite, ajouter des “amis”. Les critères déterminant qui l’on considère comme “ami” varient de personne en personne — à  chacun de se faire les siens. Un bon moyen de commencer, c’est de faire le tour des amis de la personne qui nous a invité, pour voir s’il s’y trouve des gens que l’on connaît — et ainsi de suite. On peut aussi assez facilement (avec nom et prénom) regarder si les personnes que l’on connaît sont déjà  inscrites, et le cas échéant, leur envoyer une invitation en indiquant simplement leur adresse e-mail.

Les “relations” que référence Orkut sont à  double sens: si vous marquez quelqu’un comme votre ami, celui-ci reçoit une demande de confirmation — et vice-versa. A chacun ensuite d’accepter ou de refuser les demandes selon ses propres critères.

Une fois qu’on a une petite liste d’amis, on peut faire deux choses: les organiser en groupes (visibles à  soi seul pour autant que je puisse constater), et utiliser un certain nombre d’indicateurs pour les “évaluer” (le terme est mauvais mais je ne trouve rien de mieux).

On indique, pour chaque personne, sur une échelle optionnelle de un à  trois, à  quel point on trouve la personne “fiable”, “cool”, ou “sexy”. Ces points cumulés apparaissent ensuite dans le profil de la personne concernée, les points restant attribués de façon anonyme (il n’est donc pas possible pour autrui de savoir que vous avez attribué trois coeurs à  Jean). De plus, on peut s’annoncer en tant que “fan” d’une personne (il faut assumer, par contre, parce que c’est public), ou encore l’ajouter à  sa “hot-list” ou sa “crush-list”. Ces deux listes restent confidentielles, à  moins que vous figuriez également sur la “crush-list” de quelqu’un que vous avez mis dans la vôtre… (vous me suivez?). Dans ce cas, vous recevez une notification de votre intérêt mutuel!

Si la possibilité de contacts “amitiés-rencontres” ou “coquins-coquines” est bien entendu à  l’ordre du jour pour une partie de la population d’Orkut, le réseau ne se limite pas à  un succédané d’agence matrimoniale — loin de là . Un élément important du profil indique les motivations du participant: est-il là  pour se faire des amis, des contacts professionnels, trouver des gens avec qui partager diverses activités, ou rencontrer l’âme soeur (ou une âme de passage)? Ajouté aux autres informations données dans le profil, cela permet de se faire assez vite une idée des motivations de la personne concernée.

La dernière fonctionnalité d’Orkut dont je parlerai (et là , je pense que j’aurais fait à  peu près le tour de la question), ce sont les communautés. Chaque personne peut facilement s’inscrire à  autant de communautés qu’il le désire, ou en créer si elles manquent. On y trouve la communauté des webloggueurs francophones, celle des amoureux des chats, des habitants de Lausanne ou Paris, des paranoïaques d’Orkut, des fans de Manchester United ou encore des occidentaux parlant le hindi… Pour tous les goûts! S’inscrire à  une communauté n’engage à  rien, mais comme les communautés dont on fait partie sont listées sur notres profil, c’est un moyen relativement simple de donner des informations à  autrui sur ses activités ou ses intérêts.

Regardez quelles sont les communautés dont font partie les gens que vous connaissez. Utilisez la fonctionnalité de recherche dans la liste des communautés (par mots-clés par exemple, ça marche très bien), et si nécessaire, créez vos propres communautés et annoncez-les sur le forum de la communauté d’annonce de nouvelles communautés (très “communauté”, cette phrase, mais bon). Il y a aussi toute une série de “méta-communautés” concernant Orkut (une recherche pour ce mot-clé vous en donnera une liste.)

Si vous avez l’occasion de faire partie d’Orkut, et que vous n’êtes pas trop inquiet des risques de récupération marketing/publicitaire/que sais-je des informations que vous y fournirez, allez-y seulement. C’est fort amusant, et ce qui ne gâche rien, le site est très bien conçu (rapide et ergonomique). Si on se connaît et qu’il vous manque une invitation, faites-moi signe!