18 mai: ne votez pas oui par ignorance (NON à l'initiative "anti-pédophiles") [fr]

[en] Swiss votations stuff. NO to the so-called "anti-pedophile" initiative which is extremist, badly-designed, and useless when we have laws now in place which do a better job.

Le moment d’envoyer son bulletin pour les votations du 18 mai approche. Et je l’ai “là” comme on dit en pensant à toutes les personnes qui voteront oui à l’initiative de la Marche Blanche, croyant bien faire, parce que bien sûr, il faut être “contre les pédophiles”, mais quelle idée.

Alors qu’en réalité:

  • la loi qui entrera en vigueur en 2015, développée d’ailleurs sous l’impulsion de la Marche Blanche à l’époque, met déjà à l’ordre du jour l’interdiction de travailler avec des enfants pour les pédophiles condamnés et avec des personnes dépendantes pour des personnes en ayant abusé
  • l’initiative bafoue le principe de proportionnalité de la peine au crime, avec une interdiction à vie automatique contraire aux droits de l’homme (ça vous chicane pas juste un petit peu, qu’Amnesty se positionne contre?)
  • les arguments “il ne faut reculer devant rien pour protéger nos enfants” est dangereux, et va dans le sens d’une société et d’une éducation suprotectrices qui s’avère en fait extrêmement dommageable pour l’équilibre de notre jeunesse
  • l’initiative met dans un même sac les amours de jeunesse ou impliquant des ados (genre, 15-21, voire 16-32, on en connaît tous) et la “véritable” pédophilie, ainsi que l’abus de personnes dépendantes; elle est mal écrite, ratisse à la fois trop large et pas assez (abus en milieu familial ou associatif? que dalle, alors qu’on sait que c’est dans le contexte privé qu’il y en a le plus)
  • mettre en place des mesures de prévention ou de protection inutiles est bien pire que de ne pas en mettre: on se donne bonne conscience mais on ne change rien au problème (imaginez qu’on encourage les gens à mettre un grigri à leur rétroviseur plutôt qu’une ceinture de sécurité pour se protéger en cas d’accident… pas dommageable?)
  • je ne parlerai même pas (mais si j’en parle) de la mise au pilori des opposants à l’initiative; je me suis moi-même fait lyncher en bonne et due forme sur Facebook quand j’ai essayé d’introduire un peu de nuance dans le débat.

Je vais voter NON et je vous engage à en faire de même. Les sondages donnent l’initiative gagnante, largement, mais il ne faut pas perdre espoir. Mobilisez-vous. Mobilisez les autres autour de vous. N’acceptez pas la victoire du populisme, de la peur et de l’ignorance.

Certains ont développé bien mieux que moi les arguments contre. Lisez-les.

Et je vous rassure, on n’est pas pédophile ou pro-pédophilie parce qu’on refuse cette initiative.

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Initiative de l'UDC contre les familles [fr]

[en] Swiss politics. I'm against the UDC so-called "for families" initiative, and you should be too. OMG I can't believe I'm writing a political post.

Sans rentrer dans les détails, j’ai réalisé qu’il n’allait pas de soi pour tout le monde qu’il fallait voter contre la soi-disant “initiative pour les familles” de l’UDC. Alors hop, moi qui me tiens généralement bien à l’écart de tout ce qui sent la politique, je vais sauter les deux pieds dedans.

Un peu de contexte: je ne suis affiliée à aucun parti, vu que ça me fait vite mal à la tête, toute cette politique, mais je suis clairement de sensibilité gauche-verte, avec toutefois quelques idées un peu plus de droite parsemées ici et là, probablement parce que je traine trop dans le milieu du business et de l’entrepreneuriat.

Un peu de contexte concernant l’initiative. C’est une initiative de l’UDC, et les autres partis se sont alliés pour lutter contre. Ça, si on ne partage pas de façon général les vues de l’UDC, ça devrait déjà être un gros drapeau rouge. Certes, l’initiative semble séduisante (qui ne voudrait pas soutenir les familles?), mais n’oublions pas que l’UDC sont les as du marketing politique et de la communication, qu’ils ont de gros moyens et qu’ils sont extrêmement efficaces.

Oui, ce serait super si on pouvait valoriser d’une façon ou d’une autre le travail des parents qui renoncent à travailler (tout ou partiellement) pour s’occuper de leurs enfants. Ou bien le travail des enfants qui ont à charge leurs parents âgés, au détriment de leur carrière. Mais l’initiative de l’UDC ne fait pas ça.

Déconstruisons un peu.

Si je travaille et que je fais garder mon enfant, j’ai des frais de garde, et je peux déduire une partie de ceux-ci lors du calcul de mes impôts. La logique de la chose telle que je la comprends, c’est que ces frais sont en quelque sorte des frais d’acquisition du revenu: pour pouvoir travailler, gagner plus, et donc payer plus d’impôts, je dois dépenser de l’argent. Donc le calcul de l’imposition en tient compte, de la même manière qu’on peut déduire des frais d’entretien d’immeuble si on est proprio. (Vous me corrigez si je dis des bêtises, mais je crois que le parallèle est bon.)

Si je ne travaille pas et que je n’ai pas de frais de garde, je n’ai pas non plus de salaire (le ménage a moins de revenus et je paie moins d’impôts).

N’oublions pas que les revenus modestes paient déjà peu d’impôts. Un ménage qui tourne avec un seul salaire médian, ça lui fera probablement une belle jambe qu’on puisse déduire encore quelque chose.

Ensuite, il y a toute la problématique “féministe”. Là aussi, je reste généralement loin du débat, mais c’est clair pour moi qu’une initiative comme celle-ci favorise un modèle familial où la femme reste à la maison pour s’occuper des enfants. Et ça, c’est inacceptable en 2013. Je ne dis pas que je désapprouve des femmes qui font le choix de s’arrêter de travailler pour s’occuper de leurs enfants. Mais la société devrait faire en sorte que le choix entre carrière et famille soit un vrai choix. Alors qu’on sait que les femmes sont toujours moins payées que les hommes, que dans le monde du business les qualités qu’on apprécie chez les hommes sont perçues comme des tares chez les femmes, inscrire dans la constitution quelque chose qui valorise la femme au foyer au détriment de la femme professionnelle, c’est tellement rétrograde que ça me met en rage.

Je reprends: il n’y a rien de mal à élever ses enfants. Mais il n’y a rien de mal non plus à vouloir une carrière, et ça fait des générations que les femmes se battent pour que nous ayons un vrai choix là-dessus. Ce n’est pas le moment de revenir en arrière.

Ensuite, imaginons que l’initiative passe. Certaines familles (aisées, à deux parents dont un seul travaille) paieront moins d’impôts. Pour le canton de Neuchâtel, par exemple, un trou de 40 à 80 millions. Un trou qu’il faudra bien combler d’une façon ou d’une autre. Plus d’économies (et on sait qu’on économise sur le social et l’éducation), et probablement simplement une réduction des déductions de frais de garde, pour tout le monde. La super initiative pour soutenir les familles aurait donc pour effet de péjorer la situation des familles qui dépendent de structures d’accueil pour pouvoir assurer un revenu suffisant pour le ménage.

Si l’initiative était appelée “pour la suppression des déductions pour frais de garde”, je pense pas qu’elle aurait autant de succès, mais en pratique, c’est à ça qu’elle aboutit: si j’ai des frais pour faire garder mes enfants afin de maintenir mon activité professionnelle, je ne pourrai pas déduire plus que si je n’ai pas de frais. Vous voyez le problème?

Oui, c’est complexe, et compliqué. Je vous ai dit que ça me faisait mal à la tête, la politique. Et c’est là qu’ils sont forts, l’UDC: ils simplifient. Rendent simpliste, même.

L’enjeu de cette initiative, ce n’est pas de soutenir ou non les familles et de valoriser les parents (=les mères) qui font le choix de ne pas travailler.

L’enjeu de cette initiative, c’est:

  • promouvoir un modèle familial où la femme ne travaille pas
  • réduire les déductions pour frais de garde pour les ménages où les deux parents travaillent
  • réduire les déductions pour frais de garde pour les familles monoparentales
  • donner des déductions fiscales à ceux qui ont un revenu confortable, sans améliorer la situation de ceux qui peinent à joindre les deux bouts.

De plus, comme cette initiative parvient à séduire même des personnes habituellement de gauche, j’y vois un véritable risque d’UDCisation de la Suisse (on est déjà bien en chemin). Est-ce la Suisse de l’UDC que vous désirez soutenir? Parce que si cette initiative passe, si vous votez pour alors que vous ne soutenez pas les idées de l’UDC en général, vous êtes en train de faire un pas dans leur direction. Ça, c’est l’argument méta-idéologique.

Mais revenons à l’initiative: prenez le temps de réfléchir aux réelles conséquences et implications de cette initiative dont les avantages sont présentés de façon simpliste par ses partisans. Ne soyez pas dupe. Soutenir les petites gens n’a jamais été dans le programme de l’UDC.

Si on cherche une solution pour soutenir les familles, le RBI (revenu de base inconditionnel) qui se retrouvera prochainement sur nos bulletins de vote est une solution beaucoup plus intéressante — et réaliste, contrairement à ce qu’on pourrait croire de premier abord. Ça sera d’ailleurs le sujet d’un de mes prochains articles.

En attendant, n’oubliez pas de voter. Même moi je vais y penser, pour le coup.

Edit: lisez cet excellent résumé de la situation par Samuel Bendahan.

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Voter "oui" pour les bilatérales [fr]

[en] Swiss politics 🙂

300-250-frUne fois n’est pas coutume, je sors des sentiers battus ici sur Climb to the Stars pour parler politique.

Enfin, “parler politique”, c’est un bien grand mot. Ceux qui me connaissent savent que mon inculture en matière de politique n’a d’égal que mon incompréhension des mécanismes qui régissent notre économie.

Je ne vais donc pas essayer de faire croire que je comprends tous les enjeux de fond en comble. J’avoue que quand on m’a demandé de faire partie des 20 blogueurs officiels de l’opération Bloguer pour les bilatérales, j’étais la première surprise. Mais tant qu’à faire, je me suis dit, allons-y: voter “oui” à la reconduction de l’accord sur la libre circulation des personnes (avec extension) me semble être une évidence.

Je me souviens d’un fameux 7 6 décembre, et a priori, ce qui va dans le sens de l’Europe me paraît une bonne chose. Je penche également plus du côté de l’ouverture des frontières que de leur fermeture, dans le monde d’aujourd’hui.

Voter “oui”, d’accord, mais pourquoi?

C’est la question que j’ai posé aux personnes qui me suivent sur Twitter. Quels sont les enjeux, en moins de 140 caractères? Pas vraiment de réponses, du moins pas pour ce qui est du contenu de la votation. Est-ce trop complexe à exprimer en 140 caractères? Trop évident pour qu’on en fasse tout un fromage? Un “no-brainer”, comme diraient les anglo-saxons? En tous cas, pour une fois, Twitter n’aura pas vraiment éclairé ma lanterne.

Si vous cherchez un peu de substance, je vous suggère d’aller faire un saut sur le bila-blog, et de lire ce qu’ont à dire à ce sujet mes compatriotes blogueurs politiques bien plus éclairés que moi. En français, vous y retrouverez Lyonel Kaufmann de politis.ch ainsi que Christian van Singer. Christian nous raconte des histoires de guillotines et de corbeaux, et Lyonel présente un argumentaire assez bien fichu.

Et si vous êtes comme moi, que la politique ne vous intéresse que peu, que vous votez quand vous n’oubliez pas, (je ne m’en vante pas, mais il faut regarder les choses en face), que le “oui” vous paraît tellement évident que ça ne vaut pas la peine de se faire du souci, ça passera — allez déterrer cette enveloppe grise qui traîne dans le panier à courrier, mettez une croix dans la case “oui” de la votation fédérale, collez un timbre dessus et mettez-la à la boîte aujourd’hui.

(Certains vont me trucider, mais si les autres objets de votation vous prennent la tête, que comme moi également vous n’aimez pas mettre une croix quand vous n’êtes pas convaincu de votre choix& eh bien, on peut toujours laisser les cases vides. C’est mieux de renvoyer un bulletin de vote à moitié rempli que de ne pas l’envoyer du tout.)

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