Vive le journalisme! [fr]

[en] Today's example of really sloppy local journalism.

Petite nouvelle insolite du vendredi matin: certains journalistes n’ont rien à envier à certains blogueurs concernant la piètre qualité de ce qu’ils publient.

On entend encore et toujours se lamenter sur la mort du journalisme… et qu’à côté des blogs, le journalisme, c’est sérieux, ça, c’est un vrai métier, qu’on fait face à une apocalypse de l’information avec le naufrage des médias traditionnels, etc., etc.

Alors, avant d’aller plus loin, je tiens à préciser (disclaimer!) que je sais qu’il y a des journalistes qui font très bien leur boulot, etc., etc. — que mes amis et lecteurs journalistes ne prennent pas mal ce que je vais dire.

Comme toute personne qui se fait régulièrement interviewer le sait, les citations entre guillemets que l’on trouve dans un article écrit correspondent rarement aux mots prononcés, et inévitablement, quelque part entre la conversation avec le professionnel de la presse et la publication, détails et nuances se perdent en route, quand ce n’est pas carrément certains faits. A leur décharge, les journalistes travaillent souvent dans l’urgence, et sur des sujets avec lesquels ils ne sont pas forcément familiers, donc j’ai appris à accepter qu’un certain décalage entre “les faits” (qui contiennent “ce que j’ai dit”) et “le discours” (l’article) est inévitable. Avec l’expérience, je déduis aussi que c’est le cas de tous les articles que je lis, et non pas seulement de ceux pour lesquels j’ai été interviewée.

Mais passons. Ce qui m’interpelle aujourd’hui, c’est l’histoire du bancomat de Thierry Weber. Je vous laisse regarder sa vidéo explicative si vous voulez (elle est franchement un peu longuette) — mais voici un résumé des faits.

Hier, Thierry va retirer des sous au bancomat de la BCV, et trouve celui-ci en maintenance… écran actif. Il filme, fait quelques commentaires amusés. Voici la vidéo (il faut pencher la tête, avertissement, gare à votre nuque!):

24 heures s’en saisit pour faire un article un peu sensationnel à la noix, contenant la perle reproduite ci-dessous:

Reste une bande de jeunes convaincue d’avoir découvert le Graal, s’imaginant déjà joyeusement retirer un million de francs.

Oui oui, vous avez bien lu. Thierry est une bande de jeunes à lui tout seul!

La panne dévoile les secrets de la BCV (ou presque) | 24 heures

Alors on note:

  • une vidéo sur le web, ça ne peut être le fait que d’une bande de sales djeunz, et non pas d’un homme de 42 ans
  • franchement, à qui donc est-ce que ça a échappé que les commentaires de Thierry sur sa vidéo n’étaient peut-être pas à prendre au premier degré?
  • côté analyse des sources, zéro pointé pour le journaliste en question: remonter de la vidéo à son créateur, dans ce cas-ci, on ne peux pas dire que c’était un travail très compliqué (surtout qu’ils ont pris la peine d’appeler Christian Jacot-Descombes… mais retrouver l’auteur d’une source publié sur le web, ça non, on sait pas!)
  • et puis… dommage, pas possible de laisser de commentaire sur l’article pour rectifier l’erreur… ah non, c’est moi qui n’ai pas de compte 24heures pour commenter… bon, j’y vais de ce pas! Ah ben si, après avoir rempli la pile de champs nécessaires à l’obtention d’un compte pour commenter… la discussion est effectivement fermée! Bel exemple d’ouverture au dialogue.

Bref, on est pas sortis de l’auberge. Ce qui risque de buzzer plus encore que la vidéo, c’est le piètre travail de reportage sur cette histoire de la part de 24 heures!

J'aime les portraits [fr]

[en] I'm really quite happy about the article about me in the paper today. I like these "portrait" articles. The journalist has the time to talk, and it's (until now) a very nice experience.

Je crois que le portrait d’aujourd’hui dans 24heures et la TDG est le troisième que l’on fait de moi dans la presse écrite. Le premier dans Migros Magazine, fin 2004 (voir billet)et le deuxième dans 24heures il y a un peu plus d’un an (malheureusement plus en ligne, mais voici une photo de l’article papier et le billet de l’époque).

Whole Page Article

J’aime bien les portraits. En général, le/la journaliste a le temps, alors on parle, on parle, on parle. Sans vouloir passer pour outre-mesure égocentrique, je trouve intéressant de parler de moi dans ce genre de contexte — essayer de se raconter, c’est un peu, aussi, essayer de savoir qui l’on est. La quête de l’identité, celle qui durera toute une vie…

Comme toujours, il y a certaines choses dans l’article que je voudrais expliquer, développer, nuancer. (Je l’ai relu avant parution, on a corrigé certaines choses, mais parfois, à cause du format, on est obligés de laisser passer certaines choses.) Juste là, pas le courage — mais n’hésitez pas à poser des questions dans les commentaires si le coeur vous en dit, ça m’aidera peut-être à me lancer (je vous répondrai, à moins que ce ne soit personnel, bien entendu, mais essayez toujours).

Edit: oh, je viens de voir qu’un morceau de la vidéo était également en ligne. J’ai beaucoup aimé cette petite opération multimédia improvisée. J’espère qu’on aura l’occasion de voir la vidéo en entier lundi!

J'ai refusé mon premier interview [fr]

[en] I just refused my first interview. It was on a topic I knew nothing about until the journalist's phone call, roughly twenty minutes before the show (live). It's not that they shouldn't have contacted me, but the fact I knew nothing of the story (leak of music festival programs through blogs) and that it brought along the hairy "blogs vs. journalism" issue (I'm no means a specialist on that question) made me feel really uncomfortable about speaking up as the "bloggy specialist". The journalist understood my concerns, and I'm grateful to her for that. You'll just have to be a bit more patient until the next interview!

Eh oui. Il n’y a pas plus tard que quelques minutes. Produit de toutes mes réflexions, prises de tête et discussions au sujet de mon statut de Madame Blogs ces derniers mois.

On ne pourra cependant pas dire que j’ai refusé net. J’ai hésité. J’ai réfléchi (autant que je pouvais, pendant que je discutais au téléphone avec la journaliste et que je voyais passer les minutes). C’était pour un direct à  la RSR, vers 18h00, sur le sujet des fuites du programme de Paléo (et du Montreux Jazz) via les blogs, ce qui a eu pour conséquence (me dit-on) l’annulation de la conférence de presse qui était prévue pour aujourd’hui. Problématique: blogs et médias traditionnels (terrain ô combien glissant), motivation de ceux qui contribuent à  faire circuler des infos qui sont “sous embargo” pour la presse traditionnelle, à  qui profite le crime…

Ce n’est pas qu’on tenait à  me faire dire des choses avec lesquelles je n’étais pas d’accord. C’était surtout parce que je ne savais rien de l’histoire en question avant que la journaliste ne m’en parle (j’ai téléchargé le programme de Paléo cet après-midi sur leur site comme “tout le monde” avant d’y commander mes billets). Donc, en gros, j’allais m’exprimer en direct sur un sujet dont j’avais entendu parler pour la première fois une vingtaine de minutes auparavant. Pas très confortable pour le moins, et surtout, pas très déontologique de ma part, puisque ma présence dans cette interview sous-entendrait tout de même pour les auditeurs que je savais de quoi il en retournait.

Une autre source de mon malaise est le sentiment qu’on glisse vers une tendance où il suffit de mettre le mot “blog” dans un reportage pour accrocher le lecteur ou l’auditeur. “Le programme de Paléo circule sur les blogs” — ça donne le sentiment que la blogosphère entière se refile le programme, mais qu’en est-il en réalité? De combien de blogs s’agit-il? Je n’en sais rien. Une poignée, plus que probablement. Peut-être plus? De nouveau, je débarque, aucune idée de l’ampleur du phénomène.

Ce ne sont pas les blogs qui sont importants en tant que tel. Avec l’apparition d’internet, les médias traditionnels ont perdu l’exclusivité de la diffusion publique de l’information. Ce qu’ont fait les blogs, c’est (pardonnez-moi, mais j’aime bien cette formule) actualiser la promesse d’internet et rendre effectivement possible au plus grand nombre de s’exprimer sur la toile.

Les blogs sont aussi des machines à  conversation, ils sont un média social, et fonctionnent comme du bouche à  oreille, mais avec le pouvoir de diffusion d’internet. Alors, les programmes de festival qui circulent, ça n’a rien de bien extraordinaire, à  mon humble avis.

Quand vous préparez un festival, il y a des tas de gens “à  l’intérieur” qui connaissent le programme ou une partie de celui-ci. Il y a des fuites. Il y a toujours des fuites. Et maintenant, au lieu de juste parler de ce que l’on sait à  ses voisins, collègues, et amis, on le colle sur son blog. Des inconnus le lisent. L’information se diffuse. Et les pauvres médias traditionnels qui respectaient l’embargo se posent des colles: les blogueurs en parlent, pourquoi pas nous? Mais les blogueurs, eux, se contentent de parler de ce qui les intéresse, avec plus ou moins de sérieux, plus ou moins de compétence, sans se préoccuper de questions d’exclusivité ou d’embargos.

Quant à  la fameuse “opposition” entre blogs et médias traditionnels qui plaît à  certains (on peut mettre en avant le manque de crédibilité des blogs — mais franchement, qui est plus crédible, le patron d’entreprise qui vous parle directement de ses produits, ou bien un resucé de communiqué de presse rédigé par l’agence de communication engagée spécialement pour l’occasion?), je pense qu’il n’y a pas de réponses simples à  apporter. En tous cas moi, je n’en ai pas, et surtout pas hors contexte, en deux minutes de direct, sans préparation. Ce que je sais cependant, c’est que je vois une cohabitation plutôt qu’une opposition. C’est clair que l’évolution d’internet force la presse traditionnelle à  se remettre en question. Mais je ne suis pas une spécialiste de la presse 🙂

Qu’il soit bien clair: je ne jette nullement la pierre à  la RSR pour m’avoir contacté. Si j’avais suivi l’affaire, j’aurais volontiers fait la spécialiste et tenté d’apporter un modeste éclairage à  l’histoire. Mais là , ça me mettait dans une situation vraiment trop inconfortable. La journaliste (avec qui j’ai parlé près d’un quart d’heure au téléphone) a tout à  fait accepté mes réticences et je l’en remercie.

Je crois juste qu’il est grand temps que je commence à  faire attention à  n’intervenir dans les médias traditionnels que lorsque je me sens réellement compétente pour le sujet, et pas juste parce qu’il s’agit de blogs, et qu’en blogs de manière générale, je sais plus ou moins de quoi je parle.

Le reportage peut être écouté ici.

De l'inutilité des blogs [fr]

[en] A local editor/journalist wrote an article in which he basically says blogs are useless noise. My reactions to some of the (IMHO) unfair attacks he makes towards blogs.

Dans son article Bloghorrée saisonnière, Philippe Barraud lance un certain nombre d’attaques à  mon sens injustifiées contre les blogs. Impossible de rester de marbre, je sors mon clavier et réagis. Je n’ai pas la prétention de convaincre M. Barraud de quoi que ce soit, mais le processus produira peut-être un billet intéressant pour mes lecteurs.

Ce n’est en tout cas pas un journal intime, puisque par définition il n’est pas intime, mais mis à  la disposition de la planète entière. Enfin, théoriquement. Pauvre planète, qui devrait subir chaque jour les états d’âme ou les soucis intestinaux de 50 millions de blogueurs!

L’auteur ne fait ici pas bien mieux que la presse romande dont il critique plus haut la lenteur et les grosses ficelles. Si un blog n’est pas intime, c’est uniquement parce qu’il est exposé sur internet? Ça ne pourrait pas être (grands dieux non!) parce que les blogueurs ne parlent justement pas de leurs états d’ame ou soucis intestinaux?

MEL, LLM, Giussani, Scoble, ils nous parlent de leurs troubles digestifs? Raph, Eolas, Marc-O, ou encore Random Acts of Reality, ce n’est rien d’autre que des états d’âme?

Certes, je mentionne ici des blogs “populaires”, avec des lecteurs, et tout. Alors deux choses:

  • il y a des blogs moins lus, moins connus, qui parlent d’autre chose que leur nombril;
  • ce n’est pas parce qu’il sont moins lus qu’ils ont nécessairement moins d’influence: comme le disent Robert Scoble et Shel Israel dans Naked Conversations, si mon blog politique n’a que trois lecteurs, et que ce sont les dirigeants des Etats-Unis, de la Russie, et de la Chine, ai-je vraiment besoin d’autre chose?

On ne va pas le nier, la plus grande partie de la blogosphère francophone, c’est Skyblog. Mais là , on regarde les nombres, pas l’influence. Si j’ai bien compris Philippe Barraud, la blogosphère “personnelle”, celle qui me tient à  coeur parce qu’elle me permet de rester en contact avec mes amis par-delà  les océans, ça ne l’intéresse pas. C’est son droit. On va donc se concentrer sur les blogs “qui comptent”, comme on dit. Ce n’est pas sur Skyblog qu’on va les trouver. Il faut aller explorer le monde, un peu.

La supercherie, c’est qu’on tend à  nous faire croire que tout cela est lu, que chacun peut prendre la parole, que le débat démocratique renaît, […]. D’abord, et c’est un obstacle colossal, personne ne saura que votre blog existe.

Pardon? Ne savez-vous pas que pour peu qu’on utilise une plateforme de blogs pas trop “underground”, chaque billet alerte Technorati de la mise à  jour. Le blog est listé sur leur site, et si on utilise des tags et des catégories, il se retrouve également sur les pages de tags. Les gens peuvent trouver le blog, et Google peut trouver le blog. Après, si il a des choses à  dire qui sont intéressantes pour d’autres personnes (pas forcément le monde entier!) le blogueur va gentiment se faire une place dans la niche où se trouve son public.

Là , franchement, erreur factuelle. Dès sa mise en existence, un blog est publicisé.

Etre lu, ou pas. Voilà  la question. Comme je dis plus haut, ce ne sont pas les nombres qui comptent, c’est qui lit un blog qui est important. Certaines personnes chez Microsoft ne pensent pas que ce que fait Robert Scoble est important pour la boîte, parce qu’il n’a que (!) 20’000 lecteurs quotidiens. Pour un blog, c’est énorme, mais pour une grosse entreprise habituée aux chiffres marketing, c’est un pet de lapin. Robert dit très justement que ces personnes n’ont pas saisi qu’internet est un réseau, et à  quelle vitesse les informations peuvent s’y propager. Même si l’on n’a que cinq lecteurs, on peut théoriquement voir une idée géniale publiée sur son blog faire le tour de la blogosphère en quelques heures. Bien sûr, avec plus de lecteurs, on facilite le phénomène, mais ce n’est pas requis — de loin pas.

Quant à  prendre la parole… Allez réagir à  quelque chose qu’a écrit DSK sur son blog. Vous l’avez, la parole. Il suffit d’avoir quelque chose à  dire.

[…] ce mode de communication s’autodétruit, par son abondance même: qui a donc le temps d’aller explorer des millions de blogs, voire seulement une dizaine par jour?

Ça, c’est un problème général: la surcharge d’information. Solution? Il faut trier. J’y arrive tout de suite.

[…] pour un blog intelligent ou talentueux qui vous apporte quelque chose, il y en a 100’000 d’insignifiants.

Oui, il y a du bruit dans la blogosphère. Mais ce qui est du bruit pour moi n’est pas forcément du bruit pour vous. Des goûts et des couleurs, comme on dit. Allez, on dégaine son aggrégateur RSS/atom et on s’abonne aux blogs qui nous intéressent. Même Commentaires.com, qui n’est pas un blog, attention, surtout pas (puisque les blogs c’est inutile) a son fil RSS. Comment? Vous n’utilisez pas d’aggrégateur? On file direction BlogLines, iFeedYou ou Gregarius.

Ce ne sont pas des blogs précis, mais des thèmes qui vous intéressent? Direction PubSub ou Technorati, on crée un compte, on crée des watchlists auxquelles on s’abonne… Vous voulez la Romandie? Des recettes de cuisine?

Robert Scoble garde ainsi un oeil sur plusieurs centaines de blogs (7-800 aux dernières nouvelles). Est-il besoin de tout lire? Certes non. Mais surveiller une grand nombre de blogs, surtout quand c’est utile pour son métier? Bien sûr que c’est possible.

Ça prend du temps bien sûr. Si l’on pense que c’est du temps perdu, il vaut mieux s’abstenir — car il le sera effectivement.

Ce qui montre que tout travail d’écriture exige une discipline rigoureuse; et qu’à  l’inverse, l’écriture paresseuse du blog ne débouche neuf fois sur dix que sur des textes médiocres, bâclés et non indispensables.

Je sens ici un peu de snobisme d’écrivain. Faut-il être indispensable pour mériter l’honneur d’être rendu accessible au public? J’espère bien que mon blog n’est pas indispensable — mais j’espère aussi que de temps en temps il peut être utile à  quelqu’un.

Ai-je le droit de vivre si je ne suis pas indispensable?

Etre Madame Blogs [fr]

[en] You may or may not know that I've become the person journalists contact around here when they have an article to write about blogs. Not always, but often. Media fame is neat, but can be tiring when it becomes routine, and you're filled with self-doubts on the part you're playing in giving the public a biased vision of what blogs and blogging are. A bit of history, some thoughts, and a little rant. If you don't read French, you're lucky -- you can come back later when I have more constructive things to say.

Je me souviens du tout premier téléphone que j’ai reçu de la part d’un journaliste. J’allais sur mes 19 ans, j’étais cheftaine scoute, et il s’agissait d’une sombre histoire concernant le terrain que nous désirions occuper durant notre camp d’été. J’ai bredouillé quelques réponses à  des questions dont je ne comprenais pas vraiment l’objet, sans même saisir que j’allais être citée dans un article.

Plusieurs années passent. Je suis en Inde. Je suis en train de marcher vers l’arrêt des taxis lorsqu’un homme à  scooter s’arrête à  ma hauteur et propose de me prendre en stop. J’accepte. Nous échangeons quelques banalités sur les raisons de ma présence en Inde. Il est journaliste. Il désire m’interviewer. Contre toute attente, l’interview se fait, et l’article paraît.

On est en Inde, le pays des aventures extraordinaires. Je rentre donc en Suisse avec l’article sous le bras, des tirages des photos, et une promesse morte-née de rôle dans un film hindi qui perdra son financement lors des événements du 11 septembre 2001. Je n’en reviens pas, je n’y crois qu’à  moitié, mais en Inde, tout peut arriver : il y a eu un article à  mon sujet dans le Pune Times.

Entre 2002 et 2004, je compte cinq interviews, dont quatre sur les blogs. C’est très excitant, je me sens tout à  fait honorée d’être digne de l’attention de ces Messieurs-Dames journalistes. C’est même assez incroyable de penser que ma petite activité sur Internet a une répercussion dans « le vrai monde ». Je passe à  la radio pour la première fois de ma vie, et je découpe quelques articles dans lesquels apparaissent mon nom.

Début 2005. Là , tout s’accélère : dès la publication de « Née pour bloguer » dans Migros Magazine, les interviews s’enchaînent. Le 20 février, je suis l’invitée du plateau de Mise au Point à  la Télévision Suisse Romande : 10 minutes de direct. Pour un baptême-télé, c’est énorme. Ça continue.

Pourquoi diable est-ce que je vous raconte tout ça ? Il y a deux raisons. La première, c’est qu’il y a depuis quelque temps des petites voix (dans mon entourage et ailleurs) qui chuchotent que je prends un peu trop de place dans la presse romande, et qu’il y a en Romandie des tas d’autres personnes aussi (voire plus) compétentes que moi en matière de blogs. La deuxième, c’est que je commence à  me sentir passablement blasée face à  toute cette attention médiatique, même si je l’apprécie, et que donner des interviews et voir mon nom dans la presse a perdu l’attrait de la nouveauté.

Je ressens ces temps le besoin de me situer un peu par rapport à  l’attention que portent les médias, et au statut de « Madame Blogs » qui semble être devenu le mien. je me pose beaucoup de questions. Est-ce que je fais du tort « aux blogs » en étant un peu l’interlocutrice privilégiée des médias sur le sujet ? Est-ce un peu de ce ma faute si maintenant, un blog est en Romandie un « journal intime d’adolescent plein de photos », à  l’exclusion de toute autre chose ? Est-ce que je sais vraiment de quoi je parle ? Devrais-je refuser des interviews ? Est-ce que je pourrais faire encore plus pour envoyer les journalistes qui me contactent vers d’autres blogueurs compétents que je connais ? Est-ce que je fais preuve de complaisance envers la presse ? Est-ce que la célébrité me monte à  la tête et m’aveugle…?

Pour commencer, disons-le haut et fort, je ne m’imagine nullement être l’autorité ultime en matière de blogs. Certes, j’ai des tas de choses à  dire sur le sujet, je connais la blogosphère (non ! une petite partie de la blogosphère !) de l’intérieur et depuis belle lurette, et je porte sur elle un regard doublement double : technique et humain, francophone et anglophone. Je sais bien qu’il y a des tas d’aspects des blogs et de l’Internet social qui m’échappent. Je ne peux pas tout suivre !

Mon métier principal n’a rien à  voir avec Internet et les blogs : il consiste à  enseigner l’anglais et le français à  des adolescents. Internet bouge vite, la blogosphère aussi, et de plus en plus de personnes travaillent dans le domaine. Il est normal que je paraisse « larguée » sur certains points : je suis une généraliste du blog, avec, un peu à  mon corps défendant au départ, une petite spécialisation dans les affaires adolescentes. Les généralistes en savent toujours moins que les spécialistes, c’est bien connu.

Plus j’y réfléchis, plus je me dis que ma principale qualité d’interviewée, avant ma « connaissance de la blogosphère », c’est peut-être simplement mon talent de vulgarisation. Je sais généralement expliquer les choses de façon à  ce que les gens comprennent. Je n’éprouve aucune difficulté à  mettre mes idées en mots. Je m’exprime plutôt bien, que ce soit par oral ou par écrit. Une journaliste avec laquelle j’avais sympathisé m’a dit une fois : « Tu te demandes pourquoi on t’appelle autant ? Mais c’est parce que tu nous mâches le travail ! »

Donc, voilà . Les journalistes romands ont leur « spécialiste-généraliste du blog » qui est plutôt bavarde (un ami journaliste m’a raconté son interview-cauchemar : un interviewé qui répondait à  ses questions par un grognement à  mi-chemin entre le oui et le non), qui leur facilite la tâche… et qui en plus est photogénique. Moi, je réponds aux interviews, qui se suivent et commencent à  se ressembler, je me creuse la tête (je vous promets !) pour leur proposer d’autres noms lorsqu’ils en cherchent ou lorsque leurs questions nouvelles dans des domaines qui me paraissent mieux maîtrisés par d’autres.

Souvent, je suis un peu empruntée : qui est la bonne personne à  interviewer sur tel ou tel aspect des blogs ? Je ne sais pas toujours… De loin pas. Je songe parfois à  mettre sur pied une liste de blogueurs romands avec leurs compétences. Mais par où commencer ? Qui inclure, qui exclure ? Je ne connais pas tout le monde ! Si je cite Untel mais que j’oublie Teltel, on va m’en vouloir, surtout si les personnes concernées gagnent leur vie (ou une partie) avec les blogs… C’est bête, mais je commence à  avoir peur du poids de mes mots.

Je trouve d’autant plus difficile de déterminer quelle est « l’attitude juste » à  avoir face aux médias que je suis bien consciente d’avoir des intérêts personnels en jeu. D’une part, les blogs me permettent également de gagner une partie de ma vie (enfin, j’essaye). D’autre part (pour des raisons bassement psychologiques que vous pouvez vous amuser à  interpréter si ça vous chante), je trouve du plaisir à  être sous l’oeil du public, tant que cela reste à  doses raisonnables, bien sûr : j’ai adoré passer à  la télé, j’aime parler en public, être prise en photo, voir mon nom écrit ailleurs que sur un écran… Vous voyez le topo. À quel moment ces intérêts personnels risquent-ils de prendre le pas sur mon ambition d’être une informatrice fiable et consciente de ses limites ? Mon rôle d’interprète de la blogosphère, pour les personnes qui m’interviewent, peut-il être corrompu par ma recherche d’attention ou des considérations pécuniaires, malgré la lucidité que j’essaie d’avoir à  leur sujet ? Au cas où vous en douteriez, je suis quelqu’un qui se pose beaucoup (trop) de questions.

Pour tenter de clore ce trop long billet, je reviens sur la situation concrète qui m’a incitée à  le rédiger : l’effet de nouveauté des interviews est passé. Ça me met un peu mal à  l’aise de dire ça, mais c’est devenu un peu la routine. Bien sûr, je réponds encore volontiers aux questions des journalistes, et ça me fait toujours plaisir que l’on s’adresse à  moi. Cependant (et là , je vous volontiers que ce sont les motivations pécuniaires qui me poussent), les interviews, cela prend du temps. Or les interviews (une amie à  moi était fort surprise de l’apprendre l’autre jour) ne sont pas rémunérées, et le temps est une denrée précieuse qui me manque toujours, même si je n’ai pas mon pareil pour le gaspiller. (Je vous épargne le triste récit de ma situation financière.)

Donc, je disais que je prenais volontiers de mon temps pour accorder des interviews. Mais. S’il vous plaît, Mesdames et Messieurs les journalistes, faites vos devoirs avant de m’interviewer. Allez visiter quelques blogs. Mettez les pieds sur le mien, c’est la moindre des choses. Allez jeter un coup d’oeil aux articles de vos collègues, afin de ne pas me faire répéter ce que j’ai déjà  dit trois fois. Il se trouve que j’ai écrit un article (bien modeste) sur les blogs, intitulé Les blogs : au-delà  du phénomène de mode. Allez au moins y jeter un coup d’oeil, cela vous donnera une petite idée de ce que je pense des blogs, en plus de quelques points de départ pour vous faire une idée par vous-même. Et, s’il vous plaît, évitez de me dire : « Donc, un blog, c’est un journal intime d’adolescent, c’est bien juste…? »

Télévision et lancement [fr]

N’oubliez pas de regarder Mise au Point ce soir sur la TSR. Je lance Stephanie-Booth.com, mon site “business”.

Il y a des moments dans la vie où les événements semblent s’être donné le mot pour vous pousser gentiment dans la bonne direction. Ces temps, je crois que c’est le cas pour moi.

Aujourd’hui, je me retrouve pour la première fois de ma vie à  la télévision (et en direct, s’il-vous-plaît!) dans l’émission Mise au Point (TSR1, 20h00). Et aujourd’hui, j’ai l’honneur et l’avantage de vous présenter Stephanie-Booth.com. Je m’explique.

Le journalisme et le consulting indépendant sont deux voies professionnelles qui m’attirent depuis longtemps. Outre le fait que je suis ces jours au bénéfice d’un petit peu de “célébrité médiatique”, je me retrouve de plus en plus régulièrement à  présenter internet et les weblogs à  des gens qui désirent faire leur site web. Tout le feedback positif et les encouragements que j’ai reçus ces derniers temps sur mes activités m’incitent à  prendre la balle au bond, si on peut dire, et à  me lancer.

Stephanie-Booth.com est donc mon site “orienté business”. Il donne accès à  mes diverses activités en ligne, à  mon profil “professionnel”, et présente les services que j’ai l’intention d’offrir. N’hésitez pas à  me demander des détails où à  me donner du feedback sur ce nouveau site (sauf si c’est pour critiquer le rose).

(Ah oui, j’allais oublier: je ne quitte pas l’enseignement! A terme, j’espère combiner un poste à  temps partiel dans l’enseignement avec une activité indépendante.)

Edit 13h20: L’émission sera en ligne une demi-heure après la fin de la diffusion. Merci de mettre l’URL en commentaire pour les autres si vous trouvez où c’est!