Pourquoi je parle à ma newsletter [fr]

[en] I'm not writing the same stuff in my Intermittent Newsletter as I am on this blog, though the newsletter is publicly archived and some people receive these blog posts by e-mail. Going online, our social/identity contexts collapse, but other kinds of contexts appear: determined by the tools we use (write a text in Word, Powerpoint, or an e-mail, and see what I mean) and the perceived audience we are talking to (discussion in a 10-person meeting streamed live online vs. the same happening in a room with 500 people).

Ce matin, avant de partir en randonnée, j’ai rapidement envoyé une newsletter. Pas Demande à Steph, l’autre, celle que j’envoie de temps en temps et où je raconte des trucs.

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Ça fait un moment que je remarque que je me sens nettement plus “libre” d’écrire ma newsletter plutôt que de faire un article ici. J’ai des tas d’idées d’articles à écrire, un monstre backlog, même, ça s’empile, mais je me mets de la pression.

Ecrire ici, c’est “publier”. Ma newsletter a beau être archivée publiquement, j’ai moins un sentiment de “publication”, parce que je l’envoie par e-mail à des destinataires spécifiques.

L’écriture, la communication: ce ne sont pas des actes isolés du monde. Ils ont un contexte. On l’a tous vécu lorsqu’on essaie de répéter une présentation dans son salon. C’est pas la même chose que lorsqu’on sera dans la salle avec les gens devant nous.

En ligne, même si nos contextes sociaux s’effondrent les uns sur les autres (sur Facebook on retrouve les gens du boulot, les potes avec qui on sort, les gens du club de sport, les voisins), j’ai l’impression que d’autres contextes se dessinent. Ils sont déterminés par l’outil qu’on utilise, et par le public explicite (perçu) auquel on s’adresse.

Ouvrez un document Word, un e-mail, ou un Powerpoint, pour écrire quelque chose: vous allez l’exprimer différemment en fonction de l’outil dans lequel vous le faites.

Le public perçu, c’est un peu moins évident à expliquer, mais c’est quelque chose dont j’essaie de parler depuis dix ans, quand je donnais des conférences pour expliquer les blogs d’adolescents aux parents et enseignants un peu décontenancés.

Le public potentiel “tout le monde” d’une page web est quelque chose de complètement abstrait pour notre petit cerveau de primate. A la place, on utilise des approximations. Quand on est physiquement dans une salle de 500 personnes, on les voit, les 500 personnes. Quand on est derrière son clavier, on a à l’esprit les personnes auxquelles on pense, et surtout, celles qui répondent, celles qui réagissent, celles dont on sait qu’elles sont là.

Quand je rédige une newsletter, il y a un nombre fini (et modeste) de destinataires. C’est à eux que je m’adresse.

Quand j’écris un article sur ce blog, j’avoue que je ne sais plus trop qui est là. Il y a des gens que je connais, mais je me dis qu’il doit y avoir aussi beaucoup de gens que je ne connais pas. J’ai conscience du fait que Google va passer indexer mes articles et qu’on pourra bien les trouver. J’ai un sentiment de plate-forme publique.

Ce qui est marrant c’est que ma newsletter est archivée publiquement (à la “blog”) et que certains lecteurs de ce blog recevront cet article par e-mail. Mais pour moi qui écris, c’est le public premier qui semble importer.

La newsletter c’est d’abord un e-mail, et le blog c’est d’abord une publication sur le web.

Une autre caractéristique de ces deux contextes (blog et newsletter) c’est comment ils gèrent l’interactivité. Avec le blog, n’importe qui peut laisser un commentaire qui sera attaché à l’article. Ce n’est pas anodin, et c’est une des choses qui a rendu ce format de publication si puissant, avant que l’on se fasse happer par Facebook. Avec la newsletter, les destinataires peuvent me répondre par e-mail, en privé. Et c’est tout. Les personnes qui liraient la newsletter archivée ne peuvent pas laisser un commentaire ni me contacter directement.

Facebook, pour aller plus loin, est un environnement encore plus interactif: il n’est fait quasiment que de discussions. Ça va vite, les gens réagissent, et parfois même me rentrent dans le cadre. Ce n’est pas un mal en soi, mais ça tend à rendre timide.

A noter aussi qu’en dix ans, je vois une augmentation de l’agressivité en ligne. Je me sens plus exposée. J’ai fait quelques mauvaises expériences, aussi. Le public est vraiment très public. Public de visibilité, mais aussi demandant activement qu’on le défende. Des fois j’ai juste envie d’écrire, et pas de défendre ce que je dis. Qu’on prenne, ou non, et voilà. Un peu égoïste peut-être, ou juste de la lassitude.

Ecrire quelque chose sur Facebook, c’est s’attendre à des réactions possiblement rapides, et qui demandent que l’on soit là.

Ici, sur le blog, c’est plus “confidentiel”, au sens où tout mon réseau social n’est pas branché dessus, où la plupart des gens ne prendront pas la peine de laisser un commentaire sur place (on a Facebook pour ça), mais aussi plus exposé parce que sur la route de personnes bien plus “hors de mon réseau” que quelque chose que je mettrais sur Facebook.

Et la newsletter, finalement, c’est comme une correspondance privée avec une équipe de personnes. Même si c’est pas privé. Logique, hein?

Si je n’avais pas déjà bien mal à la tête (probablement ma nuque qui a pris un coup quand j’ai glissé lors de mon retour de randonnée) je me lancerais dans une petite analyse des conséquences que ça pourrait avoir de republier sur ce blog mes newsletters — quelque chose que j’ai l’intention de faire mais que je n’ai, visiblement, pas encore fait.

En résumé: si vous voulez que je vous raconte des trucs dans votre boîte de réception, c’est par ici.

Being a Digital Freelancer in the Era of Context Collapse [en]

[fr] Réflexions sur ma carrière et les enjeux du marché d'aujourd'hui pour les "pionniers des médias sociaux", avec en toile de fond l'effondrement de nos contextes d'être et de communication dans le monde en ligne (Facebook, bonjour).

Contexte collapse. It’s crept up on me. It used to be semi-overlapping publics, or more precisely, they point to two different faces of the same thing.

Semi-overlapping publics remind us that we do not all see quite the same public. This was the “new” thing Twitter brought compared to our old IRC channels. Now it’s trivial, obvious even, to point it out.

Walking Alone

Context collapse points to the fact that the natural boundaries in our lives have broken down. I was aware of this going on, and it never really troubled me. On the contrary: I loved (still do) the idea of bringing people from different places together, of the melting-pot, of wrecking the big, artificial and sometimes even harmful boundaries we have erected between our private and professional lives. We are whole people.

But what I’m seeing now is that contexts have collapsed to the point where it is putting a break on our desire to express ourselves. I am feeling it myself.

I just had a great catch-up call with my old friend Deb Schultz from over the Atlantic. We shared our observations on our professional lives, so similar. I’ve had other conversations with my peers lately, people who have “been around” this “online social stuff” for a long time. I went freelance 10 years ago, and as I already mentioned the “market” has changed dramatically. From medium-sized fish in a small pond, pretty much the only person in my geographical area you could call up to interview about “blogs” or ask to give a talk on the topic, I feel I am now in a really big pond full of fish of all shapes and sizes, thrashing about much more vigorously than I am.

Talking with Deb tonight, I realised how “not alone” I was in my current professional predicament. And here’s what it has to do with context collapse: I feel I have lost the spaces I used to have which were public enough to be useful, and private enough that I might feel comfortable saying “hey guys, time to send me work/clients if you have any leads”.

Facebook is full of everybody, including ex-clients, future clients, even current clients. Peers, family and friends. Context so collapsed it is flat as a pancake. I think I did well online in the early days because I am not as scared of context collapse as most people. I am comfortable talking (and being honest) about a lot of things with a lot of people. My online presence brought me visibility, which brought me a career. Contexts “just collapsed enough”.

But everybody has their limits, and, like many people, I find it hard to talk about the challenges I might face running my business with people who are paying me for said business. Because you want your clients to trust you, and believe in you, because you’re good, right, and if you’re good you cannot be anything but successful. If there is a crack in your success, it can only mean you’re not that good.

It could mean you’re not that good at self-marketing and sales, though. (That’s another — long — post.)

(And a shout-out to Robert Scoble, who was an early inspiration to me when it comes to “putting it out there”, and who has come back from Facebook to tell us where he’s at. Read his post.)

During tonight’s discussion, on the backdrop of other recent conversations with my peers, I realised there really is a whole generation of us early independent social media professionals who are facing similar issues. Our industry has matured, “social media” (or whatever you want to call this online stuff) is in every company and agency. Those who arrived later in this area of expertise are specialised: you have community managers, social media marketers, digital content specialists, etc, etc.

We early birds often have more generalist profiles. I know it’s my case. We’ve touched all this, seen it grow and take shape. And now we wonder where we fit in. Personally, I’ve been wondering for years (on and off) if there was still a market for what I do. Is there a decent business case for “Stephanie Booth freelancer”, or am I just fooling myself?

At this stage, I don’t really have the answer. One answer I do have is that there is definitely still a market for what I’ve been doing for the last 10 years when I reframe it as “digital transformation” or “digital literacy”. I’d known for a long time that describing what I did as “social media” was problematic, because it bundled me up with “marketing”, or had people thinking I was a “community manager” who would “update their Facebook page”. So, it’s been a big relief to find a way to talk about this aspect of my work that feels right.

What I don’t know yet is:

  • how do I talk about “the rest” of what I do/can do: analysing needs, challenging solutions to make sure they really solve problems, digging to identify real problems, offering solutions, coordinating, planning…?
  • do I have the “business skills” (sales, marketing) to “make it” as a freelancer when I’m not benefitting from media spotlight or being one of the only fishies in the small pond?
  • is it time to “reboot” and work as an employee for a few/many years, and if so: client-side, agency, consulting… — and am I “employable”, at 40+, having been freelance for almost my entire career?

The “safe spaces” to talk about these things are not completely gone. We have one-one conversations, if we take the trouble to plan them, like my friend and I did tonight. We have spaces like the Going Solo Slack, where a handful of us chat from time to time. And newsletters. I really believe the context collapse and fragmentation of the major social spaces like Facebook has something to do with what I sense as renewed enthusiasm for a certain type of newsletters.